Murs richardiens

Maurice Richard est le plus célèbre joueur des Canadiens de Montréal — c’est du hockey. L’Oreille tendue a beaucoup écrit sur lui (voir ici).

Le visage de Richard orne plusieurs murs de Montréal, publics et privés.

Ajoutons deux nouvelles pièces à cette petite collection montréalaise.

Sur les murs d’un restaurant, rue Ontario Est, à côté de Guy Lafleur.

Mur du restaurant Zapiroz, 3445, rue Ontario Est, Montréal

À l’intérieur d’un café-friperie, boulevard Saint-Laurent.

Mur du café-friperie Eva B., 2015, boul. Saint-Laurent, Montréal

C’est ainsi que les mythes vivent.

Le cirque Lafleur

Deux macarons de Guy Lafleur

Avec son spectacle «Guy ! Guy ! Guy !», actuellement présenté à Trois-Rivières dans une mise en scène de Fernand Rainville, le Cirque du Soleil veut rendre hommage au hockeyeur Guy Lafleur (1951-2022).

L’Oreille tendue étant une fan de Lafleur (voir ici ou ), elle a fait le périple, en compagnie de sources conjugales proches d’elle, pour assister à la représentation du 2 août.

Les spectateurs étaient accueillis par des boutiques de souvenirs, une patinoire pour s’exercer à tirer au but, des numéros de mascottes et de personnages ambulants, des lieux de sustentation divers et une structure à l’image de Lafleur pour s’y faire photographier (réseaux sociaux oblige).

Les voix de René Lecavalier et de Gilles Tremblay résonnaient dans les toilettes.

Dans la salle, avant le spectacle, plusieurs chansons, parfois consacrées au hockey, étaient diffusées (Sylvain Lelièvre, Offenbach, Diane Dufresne, Robert Charlebois, Gilles Valiquette, Émile Bilodeau, Ginette Reno [?], etc.) et des écrans offraient deux types d’informations.

Commerciales. Des annonceurs y vantaient leurs produits et services, y compris le Salon de jeux de Trois-Rivières, dont la publicité contenait une juteuse faute de langue : «envie de prolongez» (au lieu de «prolonger»).

Sportives. Sous l’intitulé «Saviez-vous», des renseignements étaient donnés sur la carrière et la vie du héros de la soirée : son enfance, le nombre de bâtons qu’il utilisait par saison (quatre douzaines), ses exploits, son amour des hélicoptères (non, il n’en possédait pas), etc. Il y avait là au moins une approximation. Les spectateurs devaient «Placer dans l’ordre les joueurs ayant le plus de points pour les Canadiens de Montréal ?» (Le point d’interrogation final était évidemment fautif.) Quatre réponses étaient possibles : Maurice Richard, Jean Béliveau, Henri Richard, Guy Lafleur. La bonne réponse, affiche-t-on, serait : Lafleur, Béliveau, Henri Richard, Maurice Richard. C’est bien sûr faux : Lafleur a bel et bien eu 1246 points, mais pas seulement avec les Canadiens, puisque ce nombre inclut ses résultats avec les Rangers de New York et les Nordiques de Québec. Il faudrait encore ajouter que ces «points» sont uniquement ceux de la saison régulière, pas ceux de séries éliminatoires.

Les premières minutes du spectacle étaient occupées par des conversations d’un clown et de son acolyte musicien avec des membres du public, puis du même clown avec un spectateur (rebaptisé «Guy») appelé à servir de faire-valoir. C’était, semble-t-il, bon enfant. Sur scène, deux escaliers ayant la forme de bâtons de hockey rappelaient la façade de l’ancien Forum de Montréal.

«Guy ! Guy ! Guy !» était constitué de deux trames, souvent sans aucun lien entre les deux.

D’une part, la vie de Lafleur était racontée, y compris ses moments moins glorieux (un accident de voiture sous l’influence de l’alcool), statistiques à l’appui. Un enfant jouait son rôle tout au long de la pièce; c’était décoratif. On soulignait son étonnant rythme cardiaque (moins de quarante battements à la minute au repos). En haut de la scène, on pouvait lire quelques citations, sans véritable intérêt, sur l’homme qu’était Lafleur et sur son influence sur la société québécoise. Des enregistrements sonores et des images d’archives étaient mis à contribution. Un match était bien exploité : le septième de la finale de la conférence Prince-de-Galles de 1979, quand le numéro 10 des Canadiens avait fait tourner en bourrique l’inénarrable Don Cherry.

D’autre part, des numéros de cirque étaient présentés. Certains avaient un rapport avec Lafleur, quand, par exemple, les artistes démontraient leur stupéfiante agilité sur patins (à roues alignées). D’autres, strictement aucun : une contorsionniste, des voltigeurs, des acrobates avec roues et cerceaux ou filet aérien, des équilibristes, un fildefériste.

Le problème principal de «Guy ! Guy ! Guy !» était ce parallélisme. Les amateurs de Lafleur n’avaient pas grand-chose de nouveau à se mettre sous la dent (mais peut-être ne le souhaitaient-ils pas). Les amateurs de cirque se retrouvaient encombrés de souvenirs du hockey.

Musicalement, à côté des bruits traditionnels de ce sport (sifflet, sirène, orgue, thème de la Soirée du hockey) et des extraits de la (pauvre) poésie de Lafleur, les années 1970 et 1980 dominaient : Boule Noire, Gerry Boulet, Diane Dufresne, Robert Charlebois. Parmi les chansons les plus récentes, il y avait «Le but» de Loco Locass. Visuellement, c’était fréquemment très réussi : on était bien au Cirque du Soleil. On a aussi profité de l’occasion pour faire un clin d’œil à la Ligue nationale d’improvisation et à la passion disco. Le spectacle se terminait sur l’élévation du chandail numéro 10.

Tout au long du spectacle, l’Oreille pensait à un de ses anciens collègues. Celui-ci lui avait exposé un jour sa théorie sur certaines vedettes internationales du théâtre québécois : elles étaient incapables, selon lui, de passer de l’image au symbole, de l’habileté à l’art, du savoir-faire au sens.

Conclusion de la soirée : l’Oreille n’est pas faite pour le cirque et ses images.

La clinique des phrases (113)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Une phrase peut être correcte et néanmoins nécessiter quelques ajustements.

Soit cet avis pour des travaux d’asphaltage déposé dans la boîte aux lettres de l’Oreille tendue par les autorités municipales (lesdites autorités la préviennent de travaux à quelques centaines de mètres de chez elle, mais elle sont infoutues de lui expliquer les travaux droit devant sa porte — c’est un autre dossier) :

Si vous avez des enjeux de mobilité, prévoyez déménager, faire des travaux sur votre terrain, ou pour toute autre situation pour laquelle il serait pertinent d’informer le responsable du chantier, composez le 311 pour parler à un agent.

Quand elle a reçu cet avis, l’Oreille l’a lu rapidement et elle a été inquiète de lire «Si vous avez des enjeux de mobilité, prévoyez déménager». Cela lui paraissait excessif.

Il aurait pourtant été simple de lever toute ambiguïté : la répétition a parfois du bon.

Si vous avez des enjeux de mobilité, si vous prévoyez déménager, si vous comptez faire des travaux sur votre terrain, ou pour toute autre situation pour laquelle il serait pertinent d’informer le responsable du chantier, composez le 311 pour parler à un agent.

À votre service.

Autopromotion 701

Benoît Melançon, les Yeux de Maurice Richard, éd. de 2012, couverture

Depuis plusieurs années, l’Oreille tendue s’intéresse aux représentations de Maurice Richard — c’est du hockey.

En 2006, elle lui consacrait un livre, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle.

La Société internationale de recherche sur le hockey a retenu ce livre parmi ses «15 livres remarquables sur le hockey en français» (la liste complète, en PDF, est ici).

L’Oreille est honorée. Merci.

 

Référence

Melançon, Benoît, les Yeux de Maurice Richard. Une histoire culturelle, Montréal, Fides, 2006, 279 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Nouvelle édition, revue et augmentée : Montréal, Fides, 2008, 312 p. 18 illustrations en couleurs; 24 illustrations en noir et blanc. Préface d’Antoine Del Busso. Traduction : The Rocket. A Cultural History of Maurice Richard, Vancouver, Toronto et Berkeley, Greystone Books, D&M Publishers Inc., 2009, 304 p. 26 illustrations en couleurs; 27 illustrations en noir et blanc. Traduction de Fred A. Reed. Préface de Roy MacGregor. Postface de Jean Béliveau. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2012, 312 p. 42 illustrations en noir et blanc. Préface de Guylaine Girard.