Progrès ?

«Menthez pas ça», conseillent les panneaux de McDonald à Montréal.

Un journaliste de la Presse n’en peut plus des publicités télévisées mettant en vedette Élyse Marquis (Swiffer) et François Massicotte (Sponge Towel). Dans quelle catégorie ranger icelles si on les trouve pénibles ? Le «malaisant» (22 mai 2010, cahier Arts et spectacles, p. 8).

Qu’une langue évolue, rien de plus naturel. On a cependant le droit de grincer des dents à l’occasion — d’autant que ça ne change rien à l’affaire : on n’arrête pas le progrès.

Publicité fusion

Avec Pierre Popovic, nous proposions, dans le Village québécois d’aujourd’hui (2001), puis dans le Dictionnaire québécois instantané (2004), la définition suivante du mot souche : «A longtemps désigné ce que le bûcheron laissait derrière lui. Désigne maintenant le bûcheron lui-même.»

En 2004, nous définissions coupe (sentir la ~) ainsi : «Archaïsme hockeyistique. Rappelle le temps où la flanelle était sainte et les glorieux glorieux.»

Husqvarna fabrique, entre autres choses, des tronçonneuses. Sa plus récente publicité télévisée ? «Ça sent la coupe.»

Où le bûcheron rejoint l’amateur de hockey, autour d’une souche.

P.-S. — Pour les non-autochtones, un mot d’explication n’est peut-être pas inutile : l’équipe de hockey de Montréal s’appelle les Canadiens; on dit également la sainte flanelle et les Glorieux. Il fut un temps où cette équipe remportait plus souvent qu’à son tour la Coupe Stanley. Ce n’est plus le cas, malgré une brève fièvre collective printanière : alors, pour quelque jours, «Ça sent la coupe». L’expression a donné son titre à un roman de Matthieu Simard (2004).

 

Références

Melançon, Benoît et Pierre Popovic, le Village québécois d’aujourd’hui. Glossaire, Montréal, Fides, 2001, 147 p.

Melançon, Benoît, en collaboration avec Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, Montréal, Fides, 2004 (deuxième édition, revue, corrigée et full upgradée), 234 p. Illustrations de Philippe Beha. Édition de poche : Montréal, Fides, coll. «Biblio-Fides», 2019, 234 p.

Simard, Matthieu, Ça sent la coupe. Roman, Montréal, Stanké, 2004, 270 p. Rééd. : Montréal, 10/10, 2008, 256 p.

Benoît Melançon, avec la collaboration de Pierre Popovic, Dictionnaire québécois instantané, 2004, couverture

De la pudeur

Publicité télévisée pour la bière Coors.

On lit : «T’en veux une froide ?»

On entend : «T’en veux-tu une froide ?»

Cache ce «tu» que je ne saurais voir.

Divergences transatlantiques 001

Le fils aîné de l’Oreille tendue grandit. (Elle s’en réjouit.) Son pantalon ne suit pas. (Elle s’en réjouit moins.)

Réflexe québécois : Tiens, il a de l’eau dans la cave.

Réflexe français : Tiens, il a un feu de plancher.

Le Québec et la France, l’eau et le feu ? (En matière de langue, bien sûr.)

 

[Complément du 26 août 2014]

Une image (publicitaire) vaut mille mots. (Source : la Presse+, 16 août 2014)

Publicité de Qualinet, la Presse+, 16 août 2014

 

[Complément du 17 mai 2021]

Twitter est un excellent observatoire linguistique.

@MathieuAvanzi : en Savoie, on dit aller aux fraises.

@FrncKv : en Normandie, aller à la pêche /aux moules / à pied.

@HLessard7 : au Québec, L’eau est haute chez vous.

 

[Complément du 20 décembre 2021]

Le site Français de nos régions, le 18 décembre dernier, publiait une enquête sur ce sujet, «Porter un pantalon trop court».

«Porter un pantalon trop court», 18 décembre 2021, carte

Banalisation bienvenue

Peu importe l’étiquette : livre électronique, liseuse, livrel, tablette, livre numérique, livre bibliothèque, livre rechargeable, livre-ordinateur, bouquiniel, etc. On porte désormais sur soi un objet pour lire numériquement.

Preuve publicitaire.

Publicité Tilley, la Presse, 20 février 2010, p. A8

Tilley pense à tout, objet ancien comme nouveau.