Le ronronnement de la thermopompe

Nicolas Guay, la Vie secrète du commis comptable, 2016, couverture

Les économistes ne se privent jamais de donner des conseils, voire des ordres. En revanche, pour des réponses claires à des questions simples, ils ne sont pas toujours à la hauteur. Exemple : qu’est-ce que c’est que la classe moyenne ? Sauf exception (Ianik Marcil), ils ne s’abaissent pas à définir ce genre de chose.

Il faut alors se tourner vers les écrivains, par exemple Samuel Archibald, dans le Sel de la terre (2012), ou Nicolas Guay, dans les nouvelles de la Vie secrète du commis comptable (2016).

Prenons celle intitulée «Le pouvoir d’achat», une des plus réussies du recueil. Sans surprise, on y voit l’ascension sociale incarnée dans des objets : en banlieue, «À l’heure de l’apéro, le soleil chauffait encore alors que ronronnaient les thermopompes» (p. 57). Plus révélatrice est l’acquisition de personnel :

[Érik et July] avaient maintenant à peu près tout ce dont une famille moderne a besoin : la maison, la voiture, la piscine, la télé de cinquante pouces, l’Internet haute vitesse. Ils avaient même des employés : la femme de ménage, la gardienne, la compagnie de terrassement (p. 55).

Et si c’était cela, la classe moyenne, devenir petit patron ?

P.-S. — Nicolas Guay mène une double vie (au moins). Sur Twitter, il est @machinaecrire. Suivez-le.

 

Références

Archibald, Samuel, le Sel de la terre. Confessions d’un enfant de la classe moyenne, Montréal, Atelier 10, coll. «Documents», 03, 2012, 87 p. Ill.

Guay, Nicolas, la Vie secrète du commis comptable, Chez l’auteur, 2016, 115 p. Édition numérique.

Marcil, Ianik, les Passagers clandestins. Métaphores et trompe-l’œil de l’économie, Montréal, Somme toute, 2016, 181 p. Ill.

Les zeugmes du dimanche matin et de Mahigan Lepage

Mahigan Lepage, Big bang city, 2016, couverture

«Avant de retourner explorer le dehors, je devais me reployer au-dedans (dans ma tête et dans les cafés, j’ai passé l’essentiel de mon temps ces derniers jours, tandis que les touristes faisaient le tour de la ville).»

«Alors je vais voir les jeunes, traînant ma fatigue et mon sac.»

Mahigan Lepage, Big bang city. Voyages en mégapoles d’Asie, publie.net, coll. «La machine ronde», 2016. Préface de Sébastien Ménard. Édition numérique.

 

[Complément du 5 décembre 2016]

P.-S.—L’Oreille tendue a présenté ce texte le 5 décembre 2016.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Chronique gastronomico-orthographique d’un dimanche pluvieux

Chloé Savoie-Bernard, Des femmes savantes, 2016, couverture

Cela évoque une texture alimentaire et le son qu’elle produirait.

Pour certains, par exemple pour la narratrice de la nouvelle «Burger à la Gustav» de Chloé Savoie-Bernard (2016), ce n’est guère appétissant : «Dans l’avion qui se dirigeait vers Playa del Carmen, ils nous ont servi du poulet qui faisait squick squick sous les dents […]» (p. 103).

D’autres, en revanche, considèrent que cela désigne une qualité appréciable. C’est le cas à la fromagerie La Chaudière, qui en a fait le nom d’un de ses produits.

Le fromage «Skouik ! Skouik !» de la fromagerie La Chaudière

Deux aliments, deux jugements, deux graphies («squick squick», «Skouik ! Skouik !»). C’est comme ça.

P.-S. — Croyez-le ou non, ce n’est pas la première fois que l’Oreille tendue parle des fromages produits à Lac-Mégantic.

 

Référence

Savoie-Bernard, Chloé, Des femmes savantes. Nouvelles, Montréal, Triptyque, 2016, 120 p.

Le zeugme du dimanche matin et de Fouad Laroui

Fouad Laroui, l’Étrange Affaire du pantalon de Dassoukine, 2012, couverture

«Je ne m’étais pas davantage inquiété de l’étrangeté de cette enquête : pourquoi diable la Tribune de Casablanca s’intéressait-elle à ce qui se passait à quelques centaines de kilomètres à l’est, en altitude, sur ce plateau aride où ne poussent que l’alfa et les ennuis?»

Fouad Laroui, l’Étrange Affaire du pantalon de Dassoukine. Nouvelles, Paris, Julliard, 2012, 141 p., p. 54.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)