Les David Lynch de François Hébert

François Hébert, «David Lynch», collage
François Hébert, «David Lynch», collage, collection particulière

L’écrivain québécois François Hébert (1946-2023) s’intéressait au cinéaste David Lynch. Déjà, en 1985, celui-ci apparaissait, sous sa plume, dans Monsieur Itzago Plouffe (pour l’Homme-éléphant, p. 63). On le croisera ensuite dans Pour orienter les flèches (Blue Velvet, p. 93) et dans Des conditions s’appliquent (Mulholland Drive, p. 39). Il sera plusieurs fois questions de lui dans Frank va parler : pour ses films (Blue Velvet, p. 29, p. 35; Mulholland Drive, p. 135), pour sa série télévisée (Twin Peaks, p. 30, p. 72, p. 83), pour un film de son fils, John, dans lequel il joue (Lucky, p. 30-32). Hébert fait, pour l’occasion, le portrait de Lynch, sous forme d’autoportrait :

C’est mon semblable, ce Lynch aux cheveux en brosse irrégulière dressés sur la tête comme un vieux pinceau, on a le même âge, sinon la même tronche, car j’ai plutôt une tête d’œuf. Le cinéaste est peintre, ça vous change le mal de place. Et je suis poète aux heures perdues, et presque toutes le sont ces temps-ci (p. 29).

François Hébert pratiquait aussi l’art du collage : «J’en ai fait un assemblage artistique avec des objets divers, presque digne d’un altruiste» (p. 30). Oui, c’est l’illustration ci-dessus.

David Lynch vient de mourir.

 

Références

Hébert, François, Monsieur Itzago Plouffe, Québec, Éditions du Beffroi, 1985, 96.

Hébert, François, Pour orienter les flèches. Notes sur la guerre, la langue et la forêt, Montréal, Trait d’union, coll. «Échappées», 2002, 221 p.

Hébert, François, Des conditions s’appliquent. Poèmes, Montréal, L’Hexagone, 2019, 75 p.

Hébert, François, Frank va parler. Roman, Montréal, Leméac, 2023, 203 p.

Les classiques de Gromit

Logo de Wallace & Gromit

Le 3 janvier, la chaîne télévisée Netflix lançait la plus récente aventure du couple Wallace et Gromit, Vengeance Most Fowl (la Palme de la vengeance). L’Oreille tendue n’allait évidemment pas manquer ça.

Pour l’instant, retenons deux scènes.

Le chien Gromit est obligé de partager sa chambre avec Norbot, le robot que vient d’inventer son maître (façon de parler), Wallace. Il n’apprécie pas cette compagnie. Que lit-il avant de s’endormir ? A Room of One’s Own, de Virginia Woolf. (Coquille canine évitée de justesse : l’Oreille allait écrire Woof.)

Norbot est venu troubler la quiétude du 62 West Wallaby Street. Réaction de Gromit ? Il se plonge dans Paradise Lost, de John Milton.

Voilà quelqu’un qui connaît ses classiques.

P.-S.—Nous avons, en effet, récemment croisé ce duo dynamique.

Illustration : logo de Wallace & Gromit, photo déposée sur Wikimedia Commons

 

[Complément du 9 janvier 2025]

Stéphane Bortzmeyer, dans les commentaires ci-dessous et sur Mastodon, fait la démonstration qu’il est plus attentif que l’Oreille tendue. Dans le film, l’autrice de A Room of One’s Own est Virginia Woof, et celui de Paradise Lost, John Stilton. Mea maxima culpa.

Accouplements 253

Forbidden et Get Smart, collage

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Il y a une dizaine de lustres, l’Oreille tendue regardait régulièrement, en famille, la série télévisée Get Smart (1965-1970). Elle y suivait les missions loufoques de l’agent 86 (Don Adams) et sa relation avec l’agente 99 (Barbara Feldon).

Elle ignorait alors — et jusqu’à tout récemment — l’existence des amours nécessairement secrètes de 99 (Adolphe Menjou) et 66 (Barbara Stanwyck) dépeintes dans le film Forbidden (1932) de Frank Capra.

La série télévisée était bon enfant; le film, pas du tout. Tourné avant l’imposition du Code Hays, il expose une histoire amoureuse et familiale particulièrement tordue.

Voilà deux univers que tout sépare, au-delà des nombres.

P.-S.—Il y aura aussi une 66 (Elaine Hendrix) dans Get Smart, mais dans la version de 1995.

Accouplements 244

Mordecai Richler, Barney’s Version, 1997, couverture

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Mickey Haller, le héros de la série télévisée The Lincoln Lawyer, a été marié deux fois. Quand ses ex l’appellent, il est facile de les départager : c’est soit «First Wife», soit «Second Wife», qui s’affiche sur l’écran de son téléphone.

Barney Panofsky, le narrateur du fabuleux roman Barney’s Version de Mordecai Richler, a été marié trois fois. Sa deuxième femme s’appelle «the second Mrs. Panofsky».

Ces deux cas sont légèrement différents. Dans la série télévisée, sauf pour l’ordre (première, deuxième), les épouses de Mickey Haller sont sur le même pied : elles n’ont pas de nom (téléphonique). Chez Richler, Clara Charnofsky (la première) et Miriam Greenberg (la troisième) ont un nom, pas «the second Mrs. Panofsky». Ce n’était peut-être pas sa préférée.

P.-S.—Ne l’oublions pas : la mère de «the second Mrs. Panofsky» n’aime pas qu’on siffle à table.

 

Référence

Richler, Mordecai, Barney’s Version. With Footnotes and an Afterword by Michael Panofsky, Toronto, Alfred A. Knopf, 1997, 417 p. Paru en français sous le titre le Monde de Barney. Accompagné de notes et d’une postface de Michael Panofsky, Paris, Albin Michel, coll. «Les grandes traductions», 1999, 556 p. Traduction de Bernard Cohen. Édition originale : 1997.

L’oreille tendue de… Martin McGuire

Martin McGuire et Dany Dubé, Bon match !, 2023, couverture

«J’entre donc et je tombe sur le responsable de l’équipement, Pierre Gervais, qui ramasse ses affaires. Il me regarde avec des points d’interrogation dans les yeux, l’air de dire : “Pourquoi t’arrives par cette porte-là, toi ?” Je lui demande si le vestiaire est ouvert, il me répond par la négative. Je tends l’oreille et j’entends les joueurs du Canadien chanter.»

Martin McGuire et Dany Dubé, avec la collaboration de François Couture, Bon match !, Montréal, Éditions de l’Homme, 2023, 233 p., chapitre 12. Ill. Préface de Ron Fournier. Introduction de François Couture. Édition numérique.