Canidé mort

Siam, caniche royal, 2017

Quand, au Québec, dans la langue populaire, on veut marquer l’échec d’un projet, la fin d’un espoir ou l’absence de confiance en quelqu’un, on peut dire «Son chien est mort».

Ainsi, dans Usito, le dictionnaire numérique, à chien, on trouve ceci :

Son chien est mort : il ou elle n’a (plus) aucune chance. «Il voudrait sortir avec toi, ça crève les yeux. — Eh bien ! ma chère, son chien est mort depuis toujours» (Gr. Gélinas, 1950).

Il arrive aussi que des chiens meurent pour vrai. RIP Siam (2009-2022).

P.-S.—Non, les animaux ne décèdent pas.

Interrogation toponymique du jour

Publicité pour l’emploi en région, métro de Montréal, avril 2022

Ayant quitté le Togo pour vivre à Granby, comment Taka prononcera-t-il/elle le nom de sa ville d’adoption, cette «“capitale du bonheur” autoproclamée» (le Basketball et ses fondamentaux, p. 229) ?

Ainsi que le faisait remarquer, à juste titre, @OursMathieu, on entend parfois quelque chose comme «Grammebé».

La troupe de théâtre Le théâtre du futur propose, dans son plus récent spectacle, «Graine B». (Graine comme dans graine ?)

Le Wiktionnaire offre cinq variations phonétiques pour le même mot.

Tant de questions, si peu d’heures.

P.-S.— Les auditeurs de la radio de Radio-Canada se souviendront que Serge Bouchard avait toujours grand plaisir à mâcher ce mot en ondes.

 

Référence

Messier, William S., le Basketball et ses fondamentaux. Nouvelles, Montréal, Le Quartanier, coll. «Polygraphe», 2017, 239 p.

La loi poche du plus fort la poche

Simon Boudreault, Je suis un produit, 2021, couverture

Soit la phrase suivante, tirée de la Presse+ d’hier, au sujet de l’homme politique Éric Duhaime :

Ce qui m’inquiète du personnage en politique, c’est que c’est un dogmatique. C’est quelqu’un qui estime que le plus fort doit gagner, note Myriam Ségal. On est dans une société où il y a beaucoup de solidarité. Je ne suis pas tout à fait sûre qu’au plus fort la poche, ce soit la bonne politique.

Au plus fort la poche, donc : cela manquait à la collection (de poches) de l’Oreille tendue.

Usito, le dictionnaire numérique, offre la définition suivante de l’expression : «le plus fort l’emporte sur le plus faible».

D’autres exemples ?

Toujours dans la Presse+, mais en titre, le 29 mai 2021 : «Au plus fort la poche ? Pas toujours !»

Au théâtre, dans Je suis un produit (2021), de Simon Boudreault :

Y a toujours eu du monde tassé. À partir du moment où y a quelqu’un qui a quelque chose, y a quelqu’un qui l’a pas. Appelle ça de l’équilibre ou ben de l’injustice ou ben le revers la médaille ou ben la loi poche du plus fort la poche (p. 87).

À votre service.

 

Référence

Boudreault, Simon, Je suis un produit, Montréal, Dramaturges éditeurs, 2021, 157 p.

Ellipse syntaxique

François Grisé, Tout inclus. Tome 2, 2022, couverture

L’autre jour, l’Oreille tendue rendait compte du roman Morel (2021) de Maxime Raymond Bock. Elle en citait une phrase — «Faudrait je m’assise» (p. 313) — et disait que sa construction ne l’étonnait pas.

Un lecteur fidèle de l’Oreille, appelons-le L’Hispanique Bibliothécaire Le Bibliothécaire Hispanophone, s’interrogea privément : «Vraiment ?» (paraphrase)

Lisant le deuxième tome de l’excellent Tout inclus (2022) de François Grisé, l’Oreille tombe sur plusieurs phrases témoignant de pareille élision de la conjonction de subordination :

«Une chance tu viens me voir, c’est plate ici» (p. 39);

«Veux-tu j’te mette d’la crème dans le visage ?» (p. 40);

«Lui ’ssi pense j’t’une mentale» (p. 59);

«Essaye de changer ça, faut tu te lèves de bonne heure, t’sais» (p. 87).

Gardons l’œil ouvert.

 

Références

Grisé, François, Tout inclus. Tome 2, Montréal, Atelier 10, coll. «Pièces», 29, 2022, 120 p. Ill. Précédé d’un «Mot de l’auteur». Suivi de «Contrepoint. Susciter la réflexion», par Gilles Duceppe.

Raymond Bock, Maxime, Morel. Roman, Montréal, Le Cheval d’août, 2021, 325 p.