Fous du couvre-chef

L’Oreille tendue avec sa calotte Stihl

Soit les deux phrases suivantes :

«Mais après une dizaine d’années à faire la tournée des patinoires, je n’ai presque pas vu de cas de parents sautés de la calotte, d’entraîneurs qui voulaient en découdre avec un arbitre prépubère ou d’attaquants imberbes qui se prenaient pour Georges Laraque» (la Presse+, 1er octobre 2023);

«J’en ai vu en sainte-piété, des séries et des documentaires à propos de sectes d’illuminés et de leurs leaders chevelus et sautés de la calotte» (la Presse+, 9 juillet 2024).

Certaines personnes, donc, pourraient être sautées de la calotte.

Dans le français populaire du Québec et sur l’échelle de la bêtise, le sauté de la calotte est un fou. Il n’est pas fréquentable.

P.-S.—Ce sauté n’est pas équilibré.

P.-P.-S.—Cette calotte est la partie supérieure de la boîte crânienne et une casquette, la seconde protégeant la première.

Il faudrait vous en rapprocher

Deux flèches pour marquer le profit ou son absence

Quand il n’est pas en train de parler de roubignoles, l’excellent descripteur sportif Frédéric Lord est friand de l’expression loin de son profit. Il en fait souvent usage durant l’actuel Euro.

Dans le français populaire du Québec, loin de son profit marque l’insuffisance, l’objectif non atteint, la performance qui n’est pas à la hauteur, le manque de résultats.

Exemple tiré du journal la Voix de l’Est du 1er décembre 2022 :

Après avoir raté les séries éliminatoires la saison dernière, le Métal Pless de Plessisville s’est fixé des objectifs élevés en 2022-2023 : finir parmi les trois premiers au classement de la Ligue de hockey senior AAA.
Granby — Mais voilà, un coup d’œil au classement du circuit permet de constater que le Métal Pless est loin de son profit, lui qui est installé au sixième rang en vertu d’une fiche de quatre victoires et six défaites

À votre service.

Facile à démêler

«Mêlant», dans une publicité de BMO

Soit les trois phrases suivantes :

«C’est pas mêlant, on dirait que tout le monde à Dallas occupe ses loisirs en tripotant des bambins» (Document 1, p. 15).

«C’est pas mêlant, ça me rend malade» («Le crime ne paie pas», p. 32).

«C’est pas mêlant, je l’aurais étampé» (le Chemin d’en haut, p. 115).

Pas mêlant, donc, dans le français populaire du Québec.

Définition d’Usito : «C’est certain, indiscutable; […] à l’évidence.»

À votre service.

P.-S.—Inversement : «on peut comprendre que ce soit mêlant, parfois» (À boutte, p. 56).

 

Références

Blais, François, Document 1. Roman, Québec, L’instant même, 2012, 179 p.

Chabot, J. P., le Chemin d’en haut. Roman, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 171, 2022, 224 p.

Chassay, Jean-François, «Le crime ne paie pas», dans les Lieux du combat. Nouvelles, Montréal, Leméac, 2019, 179 p., p. 25-33, p. 32.

Grenier, Véronique, À boutte. Une exploration de nos fatigues ordinaires, Montréal, Atelier 10, coll. «Documents», 2022, 82 p. Ill.

N’en soyez pas un, si possible

Québec Redneck Bluegrass Project, J’ai bu, 2020, couverture

L’échelle de la bêtise, dans le français populaire du Québec, ne manque pas de barreaux; on en a déjà vu plusieurs exemples.

Ajout du jour : le taouin, en ses deux graphies (au moins).

Le Wiktionnaire le donne comme synonyme de jigon, tarla et toton, en deux graphies : taouin, tawin. Ce n’est pas un compliment.

Étienne Tremblay (p. 234) et Fabien Cloutier (p. 85) optent pour la première.

Yan Hamel (p. 72) et le Québec Redneck Bluegrass Project (p. 52), pour la seconde.

C’est comme ça.

 

Références

Cloutier, Fabien, l’Allégorie du tiroir à ustensiles. Chroniques et monologues pour se replonger dans les années 2018-2022, Montréal, Lux éditeur, 2022, 224 p. Dessins de Samuel Cantin.

Hamel, Yan, Paris en miettes, Montréal, Boréal, coll. «Liberté grande», 2023, 205 p. Ill.

Québec Redneck Bluegrass Project, J’ai bu, Spectacles Bonzaï et Québec Redneck Bluegrass Project, 2020, 239 p. Ill. Avec un cédérom audio.

Tremblay, Étienne, le Plein d’ordinaire. Roman, Montréal, Les Herbes rouges, 2023, 315 p.

Lançons-nous

Anne-Marie Beaudoin-Bégin, la Langue rapaillée, 2015, couverture

Le Petit Robert (édition numérique de 2018) connaît deux sens du mot garrocher, propre à la langue familière du Québec : lancer; se précipiter.

Lancer ? Exemple en titre de chronique : «De l’art de garrocher un livre» (le Romancier portatif, p. 89-92).

Se précipiter ? Exemple poétique chez Marie-Hélène Voyer ici. Exemple en prose : «on s’est tous garrochés» (Des histoires d’hiver, p. 10).

Ajoutons un troisième sens, proche du premier : jeter, voire se débarrasser de. Exemple romanesque : «Si j’avais deux cent mille de plus à garrocher en rénovations pis dix ans de ma vie à mettre là-dedans» (Arvida, p. 257).

Le mot a déjà cours au XIXe siècle, mais en un usage un brin différent : «Une gang s’est mise après moi et ils m’ont garoché avec des cailloux» (les Mystères de Montréal, p. 45).

À votre service.

P.-S.—Garocher ou garrocher ? Anne-Marie Beaudoin-Bégin propose une mise au point utile dans la Langue rapaillée (p. 60-62).

 

Références

Archibald, Samuel, Arvida. Histoires, Montréal, Le Quartanier, coll. «Polygraphe», 04, 2011, 314 p. Ill.

Beaudoin-Bégin, Anne-Marie, la Langue rapaillée. Combattre l’insécurité linguistique des Québécois, Montréal, Somme toute, coll. «Identité», 2015, 115 p. Ill. Préface de Samuel Archibald. Postface de Ianik Marcil.

Berthelot, Hector, les Mystères de Montréal par M. Ladébauche. Roman de mœurs, Québec, Nota bene, coll. «Poche», 34, 2013, 292 p. Ill. Texte établi et annoté par Micheline Cambron. Préface de Gilles Marcotte.

Dickner, Nicolas, le Romancier portatif. 52 chroniques à emporter, Québec, Alto, 2011, 215 p.

Robitaille, Marc, Des histoires d’hiver avec encore plus de rues, d’écoles et de hockey. Roman, Montréal, VLB éditeur, 2013, 180 p. Ill.