La clinique des phrases (ff)

La clinique des phrases, logo, 2020, Charles Malo Melançon

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit la phrase suivante, tirée d’un quotidien montréalais :

Considérant la valeur de la liberté d’expression, le pouvoir public ne peut guère aller plus loin, sur le plan de la régulation du marché des idées, que d’interdire les discours haineux et de favoriser la diversité des voix ou soutenant les institutions du savoir, les médias et les arts.

Que faire de ce bien bizarre «ou soutenant» ?

De deux choses l’une.

Remplacer le «ou» :

Considérant la valeur de la liberté d’expression, le pouvoir public ne peut guère aller plus loin, sur le plan de la régulation du marché des idées, que d’interdire les discours haineux et de favoriser la diversité des voix en soutenant les institutions du savoir, les médias et les arts.

Remplacer le «ou soutenant» et enlever un «et» :

Considérant la valeur de la liberté d’expression, le pouvoir public ne peut guère aller plus loin, sur le plan de la régulation du marché des idées, que d’interdire les discours haineux, de favoriser la diversité des voix et de soutenir les institutions du savoir, les médias et les arts.

À votre service.

P.-S.—En prime, l’auteur a recours à cette plaie de la langue contemporaine : «posture».

La clinique des phrases (ee)

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(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit un «Rectificatif» :

Le père du maestro Yannick Nézet-Séguin n’est pas comptable de profession, comme nous l’avons écrit le 29 décembre dernier dans la chronique de Lysiane Gagnon «Toujours plus haut».

Rendons à César ce qui est à César :

Le père du maestro Yannick Nézet-Séguin n’est pas comptable de profession, comme Lysiane Gagnon l’a écrit le 29 décembre dernier dans sa chronique «Toujours plus haut».

À votre service.

P.-S.—Ça paraît compliqué les rectificatifs dans la presse québécoise.

La clinique des phrases (dd)

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(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit la phrase suivante :

Symbole parmi d’autres d’une littérature québécoise aux prises avec de graves problèmes d’amnésie, Jacques Benoit se garde pourtant de s’abreuver au ruisseau empoisonné de l’amertume.

Rendons-la moins jolie :

Symbole parmi d’autres d’une littérature québécoise aux prises avec de graves problèmes d’amnésie, Jacques Benoit n’est pourtant pas amer.

À votre service.

La clinique des phrases (cc)

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(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

On a déjà eu l’occasion de le constater : en français, le féminin de certains noms peut avoir des connotations sexistes.

Prenons l’exemple du mot entraîneuse, dont il a été question dans les médias montréalais récemment. Au masculin : «Personne qui entraîne» (le Petit Robert, édition numérique de 2014). Au féminin : «Personne qui entraîne» (bis), mais aussi «Jeune femme employée dans les bars, les dancings pour engager les clients à danser […], à consommer» (ter), voire prostituée.

Soit ces deux tweets :

«Notre invitée @VirgiTremblay servait d’entraîneuse à la Canadienne @Bandreescu_ au tournoi d’Auckland en Nouvelle-Zélande.»

«Elle continue de suivre Bianca Andreescu dans son beau parcours en Océanie. Nous avons parlé en direct d’Australie à celle qui est devenue son entraîneure d’une semaine à Auckland la semaine passée.»

Entraîneuse, avec le risque des connotations évoquées ci-dessus ? Entraîneure, pour les éviter ?

Faisons plus simple :

«Notre invitée @VirgiTremblay a entraîné la Canadienne @Bandreescu_ au tournoi d’Auckland en Nouvelle-Zélande.»

«Elle continue de suivre Bianca Andreescu dans son beau parcours en Océanie. Nous avons parlé en direct d’Australie à celle qui l’a entraînée à Auckland la semaine passée.»

À votre service.

La clinique des phrases (bb)

La clinique des phrases, logo, 2020, Charles Malo Melançon

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit ce tweet :

«nos #Signets les plus populaires de l’année. En première position, la lutte contre le plastique se place en tête de nos priorités.»

Il y a le «première» de «première position». Il y a le «première» de «en tête» («Place de ce qui est en avant, devant, au début», dixit le Petit Robert, édition numérique de 2014). Il y a le «première» de «priorités» («Qualité de ce qui vient, passe en premier, dans le temps», bis). Ça commence à faire un peu beaucoup.

Donc :

«nos #Signets les plus populaires de l’année. 1. Notre priorité : la lutte contre le plastique.»

À votre service.