Les zeugmes du dimanche matin et du Méridien de Greenwich

Jean Echenoz, le Méridien de Greenwich, 1979, couverture

«Selmer promena longuement le faisceau de sa lampe, en tous sens et en vain» (p. 188).

«Murés dans leurs propres corps, ils s’étaient bornés à se désirer vaguement avant de s’endormir, chacun de son côté et de son mieux […]» (p. 213).

«Toutes sortes de balles et d’idées sinistres le traversaient […]» (p. 233).

«la tour Eiffel, […] porte, outre son propre poids, le nom de l’homme qui l’a fait construire» (p. 237).

Jean Echenoz, le Méridien de Greenwich. Roman, Paris, Éditions de Minuit, 1979, 255 p.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Le moteur de Bergounioux

Pierre Bergounioux, Aimer la grammaire, 2010, couverture

«Il s’agit d’abord de comprendre que toute phrase simple, si longue soit-elle, relève inévitablement de la structure fondamentale à trois groupes nominaux, rangés dans l’ordre, et un groupe verbal (GN1-GV-GN2-GN2’’). On peut la comparer au moteur à quatre temps (passant par les phases successives d’admission, compression, explosion, échappement et recommençant le cycle).»

Pierre Bergounioux, Aimer la grammaire, Paris, Nathan, 2010, 63 p., p. 56.

P.-S. — GN1/sujet; GV/verbe; GN2/objet; GN2’’/destinataire (p. 33).

Autopromotion 055

D. T. Max, Every Love Story Is a Ghost Story, 2012, couverture

L’Oreille tendue sera aujourd’hui, de 13 h à 14 h, à l’émission Plus on est de fous, plus on lit ! de la radio de Radio-Canada pour parler de David Foster Wallace et notamment de la biographie que lui consacre D.T. Max (2012).

Rediffusion ce soir entre 20 h et 21 h.

Peut-être aura-t-elle l’occasion de parler du bikini DFW, du coussin DFW, des t-shirts DFW, des tatouages DFW, de la présence de DFW dans les Simpsons ou, plus sérieusement, du rapport entre Aaron Swartz et DFW. Ce n’est pas sûr.

Pour en savoir plus (en anglais)…

Un blogue sur Infinite Jest

Une entrevue avec D.T. Max

Plusieurs articles de D.T. Max sur David Foster Wallace dans The New Yorker

La liste de discussion Wallace-l

 

[Complément du jour]

On peut (ré)entendre l’entretien ici.

 

[Complément du 6 février 2013]

Par quel titre aborder l’œuvre de David Foster Wallace ? L’Oreille tendue confesse un faible pour Consider the Lobster and Other Essays (2005).

 

Référence

Max, D.T., Every Love Story Is a Ghost Story. A Life of David Foster Wallace, New York, Viking, 2012, 309 p.

Les zeugmes du dimanche matin et des Grandes Blondes

Jean Echenoz, les Grandes Blondes, 1995, couverture

«Toujours nue comme un ver, Gloire allume une cigarette en même temps que le téléviseur […]» (p. 55).

«Les sujets britanniques organisaient le mardi des soirées passées à danser le cake-walk sur la terrasse en Adidas, en bermuda, en transpirant parmi les tables chargées de bouteilles» (p. 137).

«Sans horizon mais sans péril passèrent ainsi douze jours interminables, pas du tout comme Gloire les avait souhaités, certes à l’abri mais à l’étroit» (p. 211).

P.-S. — Ce ne sont pas les seuls zeugmes de ce roman; voir ici.

Jean Echenoz, les Grandes Blondes. Roman, Paris, Éditions de Minuit, 1995, 250 p.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Il n’y a plus de sot métier

«Je me suis magasiné un emploi épanouissant […].»
Charles Bolduc, les Truites à mains nues, 2012

Le monde du travail se transforme sous nos yeux. Aujourd’hui, on le sait, n’importe qui peut devenir associé ou ambassadeur de marque. De même, quand l’employabilité est en crise, il y a de l’avenir pour les conseillers en insolvabilité. Inversement, le bougon, lui, dépenserait beaucoup d’énergie, mais pour ne pas travailler.

Ce n’est bien sûr pas tout.

Engager des employés, c’est bien. Être «conseillère principale en attraction de talent» (la Presse, 30 janvier 2013, cahier Affaires, p. 7), c’est mieux. On imagine sans peine que cette personne doit travailler de près avec «des agents de talent spécialisés en branding humain».

Plus modestement, vous aimeriez devenir «responsable de la recherche et de l’élaboration du matériel relatif à l’engagement du public, notamment des campagnes de sensibilisation et de la campagne annuelle de collecte de fonds du Carême pour l’ensemble du Canada (anglophone et francophone)» ? Vous êtes potentiellement une «Personne agente au matériel pédagogique».

À une époque, les consultants — ces intervenants bien payés, le plus souvent par des décideurs avec une vision — et les experts pullulaient. Les coachs les ont remplacés.

Il en est de toutes sortes : pour les acheteurs de voitures Cadillac (la Presse, 14 mai 2012, cahier Auto, p. 5), pour ceux qui écrivent (@Coachingecrit), pour ceux qui ont besoin «de redressement» (la Presse, 11 juillet 2009, cahier Affaires, p. 10), pour les clientes des esthéticiennes (merci à @fbon), pour les «dirigeants» (@sokallis) comme pour les artistes (Culture pour tous).

Il existe même, cela ne s’invente pas, une Fédération internationale des coachs du Québec (la Presse, 23 mai 2012, cahier Affaires, p. 7).

Le cas le plus paradoxal est celui de l’autocoaching : vous êtes votre propre coach. (C’est, peut-être, plus économique.) Il faut toutefois se méfier : s’il est un «autocoaching efficace», c’est qu’il doit en exister un qui ne l’est pas. (Vous aurez été prévenus.)

De même, le «slow coaching» suppose un «fast coaching», d’où l’idée, déplaisante, d’un «coaching à deux vitesses».

L’ampleur du phénomène du coaching n’a pas échappé à Éric Chevillard, qui publiait en 2011 L’autofictif prend un coach.

Attention. Il ne faut pas confondre sauter sa coach et sauter sa coche.

P.-S. autopromotionnel — Jadis, l’Oreille tendue a publié un long texte sur la représentation de l’expert dans la prose romanesque française de la fin des années 1990. Cela s’intitulait, tout simplement, «Notice sur la précarité romanesque ou ANPE, ASSEDIC, CDD, CV, DDASS, HLM, IPSO, RATP, RMI, SDF, SMIC et autres TUC».

 

Références

Chevillard, Éric, L’autofictif prend un coach, L’Arbre vengeur, 2011.

Melançon, Benoît, «Notice sur la précarité romanesque ou ANPE, ASSEDIC, CDD, CV, DDASS, HLM, IPSO, RATP, RMI, SDF, SMIC et autres TUC», dans Pascal Brissette, Paul Choinière, Guillaume Pinson et Maxime Prévost (édit.), Écritures hors-foyer. Actes du Ve Colloque des jeunes chercheurs en sociocritique et en analyse du discours et du colloque «Écritures hors-foyer : comment penser la littérature actuelle ?». 25 et 26 octobre 2001, Université de Montréal, Montréal, Université McGill, Chaire James McGill de langue et littérature françaises, coll. «Discours social / Social Discourse», nouvelle série / New Series, 7, 2002, p. 135-158. https://doi.org/1866/13815