La clinique des phrases (113)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Une phrase peut être correcte et néanmoins nécessiter quelques ajustements.

Soit cet avis pour des travaux d’asphaltage déposé dans la boîte aux lettres de l’Oreille tendue par les autorités municipales (lesdites autorités la préviennent de travaux à quelques centaines de mètres de chez elle, mais elle sont infoutues de lui expliquer les travaux droit devant sa porte — c’est un autre dossier) :

Si vous avez des enjeux de mobilité, prévoyez déménager, faire des travaux sur votre terrain, ou pour toute autre situation pour laquelle il serait pertinent d’informer le responsable du chantier, composez le 311 pour parler à un agent.

Quand elle a reçu cet avis, l’Oreille l’a lu rapidement et elle a été inquiète de lire «Si vous avez des enjeux de mobilité, prévoyez déménager». Cela lui paraissait excessif.

Il aurait pourtant été simple de lever toute ambiguïté : la répétition a parfois du bon.

Si vous avez des enjeux de mobilité, si vous prévoyez déménager, si vous comptez faire des travaux sur votre terrain, ou pour toute autre situation pour laquelle il serait pertinent d’informer le responsable du chantier, composez le 311 pour parler à un agent.

À votre service.

La clinique des phrases (112)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit ce bout de phrase :

Chroniqueur au journal Le Devoir jusqu’à la fin de sa vie, puis à Radio-Collège pour l’émission La cité des plantes […].

L’auteur du texte dont il est tiré est un scientifique : on peut penser qu’il ne croit pas à la réincarnation et qu’il n’estime donc pas possible de collaborer à une émission de radio une fois que l’on est mort.

Revoyons cela :

Chroniqueur au journal Le Devoir, jusqu’à la fin de sa vie, et à Radio-Collège pour l’émission La cité des plantes […].

À votre service.

La clinique des phrases (111)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit l’incipit suivant :

Si XXX détient une formation en littérature, cet ouvrage rend compte d’une recherche située au plus près de l’histoire culturelle.

«Détenir une formation» ? Comment passe-t-on, sur le plan de la syntaxe, de «XXX» à «son ouvrage» ? Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Essayons ceci :

Bien que formé en littérature, XXX, dans cet ouvrage, rend compte d’une recherche située au plus près de l’histoire culturelle.

À votre service.

La clinique des phrases (110)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit le fait divers suivant, tiré d’un quotidien montréalais :

Une enquête de la SPCA de Montréal a mené à l’accusation d’un homme en Montérégie pour cruauté animale. Il serait responsable de l’attaque filmée par deux chiens sur un sanglier sans défense dans un enclos en novembre dernier.

L’Oreille tendue a déjà été la maîtresse d’un chien, et ce chien avait l’œil — pas au point cependant de pouvoir filmer quoi que ce soit.

Rétablissons les responsabilités :

Une enquête de la SPCA de Montréal a mené à l’accusation d’un homme en Montérégie pour cruauté animale. Il serait responsable de l’attaque, dans un enclos en novembre dernier, d’un sanglier sans défense par deux chiens. Cette attaque a été filmée.

C’est encore lourd, mais, au moins, il n’y a plus de chiens tenant une caméra (deux caméras, une par chien ?).

À votre service.

La clinique des phrases (109)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit une première phrase, tirée d’un éditorial de presse :

C’est pourtant la voie qu’a choisie le ministère de la Santé et des Services sociaux en publiant, le 16 décembre dernier, un avis enjoignant aux enseignants, aux bibliothécaires et aux libraires à bannir le roman Le garçon aux pieds à l’envers : Les chroniques de Saint-Sévère, de l’auteur François Blais.

Soit une seconde, dans un (excellent) ouvrage sur le français :

Le livre cite des femmes célèbres dans tous les domaines (les arts, la morale mais aussi la guerre) et exalte leurs pouvoirs intellectuels en les enjoignant à sortir de leur dépendance aux hommes grâce à l’éducation.

Un seul verbe, enjoindre, pour deux constructions : enjoindre à quelqu’un à faire quelque chose; enjoindre quelqu’un à faire quelque chose.

Les deux constructions sont fautives, ainsi que le rappelle le gouvernement du Canada; il aurait fallu enjoindre à quelqu’un de faire quelque chose.

Donc :

enjoignant aux enseignants, aux bibliothécaires et aux libraires de bannir;

leur enjoignant de sortir.

À votre service.

P.-S.—C’est Gilles Marcotte qui n’aurait pas été content.