Quasi-curiosité voltairienne

Victor-Lévy Beaulieu, Ma Chine à moi, 2021, couverture

En 1994, l’écrivain québécois Victor-Lévy Beaulieu publie Monsieur de Voltaire, une Romancerie. S’il lui arrive de reconnaître le génie de l’auteur de Candide, la plupart du temps, il médit de celui qui incarnerait «une monstruosité totalitaire dont la littérature ne nous a donné aucun autre exemple» (p. 21).

En 2021, le même Beaulieu publie Ma Chine à moi. En sous-titre : Candiderie. Y aurait-il du Voltaire là-dessous ? Que nenni.

Le narrateur de Monsieur de Voltaire mêlait le récit d’une cure de désintoxication à une analyse littéraire. Celui de Ma Chine à moi déplore son «vieillardissement» et livre ses impressions de l’histoire chinoise.

La seule allusion à Voltaire se trouve dans une lettre publique de Victor Hugo sur le palais d’Été de Pékin (25 novembre 1861, citée p. 270). De Candide, personnage et titre, il ne sera rien dit. Au lecteur de faire les liens qui s’imposent, ou pas.

Voltaire est toujours bien vivant, même si ce n’est pas là où l’attend.

 

Références

Beaulieu, Victor-Lévy, Monsieur de Voltaire. Romancerie, Montréal, Stanké, 1994, 255 p. Ill. Rééd. : Montréal, Boréal, coll. «Boréal compact», 220, 2010, 240 p.

Beaulieu, Victor-Lévy, Ma Chine à moi. Candiderie, Paroisse Notre-Dame des Neiges, Éditions Trois-Pistoles, 2021, 306 p. Ill.

Une roue peut en cacher une autre

Laurence La Palme, Jour de clarté, 2025, couverture

Soit cette phrase, tirée d’un roman d’espionnage de Laurence La Palme — c’est un pseudonyme —, Jour de clarté (2025) : «Puis il donna un coup de roue et nous nous retrouvâmes sur un chemin forestier» (p. 127).

L’homme qui conduit la voiture dont il est question n’a frappé personne avec une de ses quatre roues. Ce «coup de roue», venu de l’anglais, est plutôt un «coup de volant» («wheel»).

À votre service.

 

Référence

La Palme, Laurence, Jour de clarté. Roman. Tome 1, Montréal, Le Cheval d’août, 2025, 140 p.

Curiosité voltairienne (et british)

Anne Hébert, Kamouraska, éd. de 1973, couverture

«The Queen ! Toujours the Queen ! C’est à mourir de rire. Qu’est-ce que cela peut bien lui faire à Victoria-au-delà-des-mers qu’on commette l’adultère et le meurtre sur les quelques arpents de neige, cédés à l’Angleterre par la France ?»

Anne Hébert, Kamouraska. Roman, Paris, Seuil, 1973, 249 p., p. 44. Édition originale : 1970.

 

Au début du vingt-troisième chapitre de Candide (1759), le conte de Voltaire, «Candide et Martin vont sur les côtes d’Angleterre; ce qu’ils y voient», Candide discute avec Martin sur le pont d’un navire hollandais : «Vous connaissez l’Angleterre; y est-on aussi fou qu’en France ? — C’est une autre espèce de folie, dit Martin. Vous savez que ces deux nations sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada, et qu’elles dépensent pour cette belle guerre beaucoup plus que tout le Canada ne vaut.»

 

Voltaire est toujours bien vivant.

Curiosité voltairienne (et divine)

François Hébert, Frank va parler, 2023, couverture

«À tort les divinités sont-elles louches de nos jours, en nos arpents de neige aux bonhommes à chapeau de paille, nez de carotte, boutons de cailloux et bras de ramilles, qui fondent de plus en plus vite avec le réchauffement de la planète, tandis que les ondes 5G occupent un ciel signé Samsung que patrouillent les vrombissants drones d’Amazon aux yeux de chauves-souris.»

François Hébert, Frank va parler. Roman, Montréal, Leméac, 2023, 203 p., p. 103.

 

Au début du vingt-troisième chapitre de Candide (1759), le conte de Voltaire, «Candide et Martin vont sur les côtes d’Angleterre; ce qu’ils y voient», Candide discute avec Martin sur le pont d’un navire hollandais : «Vous connaissez l’Angleterre; y est-on aussi fou qu’en France ? — C’est une autre espèce de folie, dit Martin. Vous savez que ces deux nations sont en guerre pour quelques arpents de neige vers le Canada, et qu’elles dépensent pour cette belle guerre beaucoup plus que tout le Canada ne vaut.»

 

Voltaire est toujours bien vivant.

Curiosité voltairienne (et pédagogique)

Michael Delisle, Cabale, 2023, couverture

«Mon esprit se balade pendant que je fais mine d’être intéressé. Quels cours va-t-on me donner pour la prochaine session ? Je vais encore me retrouver avec Voltaire, je le sens. Je n’en peux plus des pitreries de Voltaire. Cunégonde, tu parles d’un nom ! Comment peut-on appeler sa fille Cunégonde ? Je décline : Cunégonde Desjardins-Allard, Cunégonde Perez-Godin, Cunégonde Nguyen-Gill. Me reste-t-il au moins une bouteille de vin à la maison ?

[…]

Manon s’ennuie. Elle n’a pas emmené leur fille. Elle trouve que la mort est une expérience trop négative pour une enfant de son âge. Négative ? Elle devrait lire Candide» (p. 81).

«Khoury est mort à sa table de travail. Il s’est effondré là, il y a deux jours peut-être, cuisant sous la lumière jaune de la lampe, le front contre un quiz sur Candide» (p. 121).

Michael Delisle, Cabale. Roman, Montréal, Boréal, 2023, 124 p.

 

Voltaire est toujours bien vivant.