Chantons la langue avec Ricoune

Ricoune, Dans un verre à ballon, 2002, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Ricoune, «Un petit Ricard dans un verre à ballon», 2002

 

Quand je suis entré dans le bar
Il était midi moins le quart
Je me suis assis au comptoir
J’ai commandé un petit Ricard
Tous les clients m’ont regardé
Ils m’ont pris pour un Marseillais
J’ai sorti un billet de 100 francs
Ils se sont moqués de mon accent

Je voudrais un petit Ricard dans un verre à ballon
Laissez-moi le consommer avec modération
On va pas se disputer pour payer l’addition
Je partirai pas sans boire la tournée du patron
Ça fait partie des coutumes et des traditions
Avant de rentrer à la maison
Un Ricard sinon rien et je reviendrai demain

Pendant que le curé fait la messe
Pendant qu’il s’occupe de nos gonzesses
Nous on fait la prière du matin
Donnez-nous notre Ricard quotidien
Il faut surtout pas oublier
Les olives et les petits salés
Demander gentiment au patron
De vous le servir avec un glaçon

Je voudrais un petit Ricard dans un verre à ballon
Laissez-moi le consommer avec modération
On va pas se disputer pour payer l’addition
Je partirai pas sans boire la tournée du patron
Ça fait partie des coutumes et des traditions
Avant de rentrer à la maison
Un Ricard sinon rien et je reviendrai demain

Quand je suis ressorti du bar
J’ai reçu un grand coup de barre
Ma copine était en colère
Elle m’a insulté d’un air sévère
Avec ton petit Ricard tu me mets les ballons
Tu vas faire tes valises et quitter la maison
Ça fait déjà longtemps que je te mets la pression
Et ça rentre dans l’oreille et ça ressort à fond
N’oublie pas tous tes costumes et tes pantalons
Avant de partir de la maison on se boit le dernier
Et on se revoit jamais… et jamais… et jamais…

Je voudrais un petit Ricard dans un verre à ballon
Laissez-moi le consommer avec modération
On va pas se disputer pour payer l’addition
Je partirai pas sans boire la tournée du patron
Ça fait partie des coutumes et des traditions
Avant de rentrer à la maison
Un Ricard sinon rien et je reviendrai demain

 

Chantons la langue avec Daniel Balavoine

Daniel Balavoine, «Le français est une langue qui résonne», 1978, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Daniel Balavoine, «Le français est une langue qui résonne», 1978

 

Quand j’entends s’enrouler les feuilles de l’automne
Que le ciel de l’été dans mon cœur se cramponne
Je me dis le français est une langue qui résonne
Je me dis le français est une langue qui résonne
Quand du fond du Québec les couleurs se bourgeonnent
[Les trois vers qui suivent sont prononcés avec un «accent québécois».]
Moi j’crois ben qu’c’est la neige qui s’effleure et frissonne
Pis j’me dis qu’le français est une langue qui résonne
Et j’me dis qu’le français est une langue qui résonne

[Quatre des cinq vers qui suivent sont prononcés avec un «accent du Sud».]
Endormi sous la mer qui saigne sur Narbonne
De mes yeux fatigués pleurent des Sables d’Olonne
Je me dis le français est une langue qui résonne
Je me dis le français est une langue qui résonne
Langue d’Oc du Nord les accents s’époumonnent
Dans ma tête versée mon pays se crayonne
Je me dis le français est une langue qui résonne
Je me dis le français est une langue qui résonne

Assis près de Calais dessous les lames bretonnes
Je regarde arriver les vagues anglo-saxonnes
Tous mes mots vieux français éclatent et bouillonnent
Tous mes mots vieux français éclatent et bouillonnent
Si des plages et des forêts s’asphaltent et se carbonent
Si les ailes collées les oiseaux abandonnent
Moi qui m’crois bon Français je sens que je déconne
De mes mots censurés que Villon me pardonne
Je me dis le français est une langue qui résonne
Je me dis le français est une langue qui résonne

 

Chantons la langue avec Johnny Halliday

Johnny Halliday, Gang, 1986, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Johnny Halliday, «Ton fils», Gang, 1986

 

On perd sa vie parfois
À devoir la gagner
Y en a qui naissent rois
D’autres du mauvais côté

Toi tu viens d’un pays que t’as presque oublié
De sable et de soleil et d’éternel été
Ceux qui ont de la chance y passent leurs vacances
Mais ceux qui y sont nés ne peuvent y travailler
Après toutes ces années juste pour exister
J’ai juste envie de dire à tes yeux fatigués

Je voudrais que ton fils vive mieux que toi
Qu’on le respecte, mieux qu’on le vouvoie
Comme un homme, un monsieur
Qui ne baisse pas les yeux
Pareil à tous ces gens qui parlent sans accent

Je voudrais que ton fils vive mieux que toi
Qu’il ait toutes ses chances, tous ses droits
Qu’il ait une signature
Des mains blanches, une voiture
Et des papiers d’identité à perpétuité

T’es pas un grand causeur on t’l’a jamais d’mandé
T’as payé en sueur le prix qu’il faut payer
Tu voulais qu’il ait tout sans jamais rien compter
Pour qu’il ait toutes ses chances
Comme les enfants de France
Pour un dernier désir, pour une ultime envie
La seule raison de croire à un sens à ta vie

Je voudrais que ton fils vive mieux que toi
Qu’on le respecte, mieux qu’on le vouvoie
Comme un homme, un monsieur
Qui ne baisse pas les yeux
Pareil à tous ces gens qui parlent sans accent
Je voudrais que ton fils vive mieux que toi
Qu’il ait toutes ses chances, tous ses droits
Qu’il ait une signature
Des mains blanches, une voiture
Et des papiers d’identité à perpétuité

 

Chantons la langue avec Michel Etcheverry

Michel Etcheverry, Irrintzina, 1997, pochette

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Michel Etcheverry, «Une pointe d’accent», Irrintzina, 1997

 

Mes amis mes amours si vous partez un jour
Laissez-moi je vous prie votre pointe d’accent
Cette musique-là me restera toujours
Rien ne peut la changer ni la vie ni le temps
C’est la magie des mots quand on berce un enfant
Le chant de la palombe à l’éveil du printemps
C’est l’envol de l’abeille dans le matin naissant
En un mot comme en cent, c’est la pointe d’accent
Mon beau pays s’appelle Euskal-Herri
J’ai dans le sang une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent
On oublie les chagrins les instants de bonheur
Les jardins sous la pluie les étés sous les fleurs
On oublie les soleils et les neiges d’antan
Mais on garde toujours une pointe d’accent
Les fameux mousquetaires avaient disait l’histoire
Au bout de leur épée une pointe d’accent
C’était un don du ciel et un titre de gloire
Henri IV était fier de l’avoir en naissant
Mon beau pays salut l’Occitanie
Nous avons tous une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent
Toi qui cherches un ami en pays d’Euskadi
S’il prononce des mots que tu ne comprends pas
Dès le premier regard tu le reconnaîtras
Il aura dans les yeux une pointe d’accent
Et à toi qui t’en vas ami de mon enfance
Je dis n’emporte pas la terre à tes souliers
Mais accroche à ton cœur ce joli coin de France
Et sa pointe d’accent qu’on ne peut oublier

Mon beau pays salut l’Occitanie
Nous avons tous une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent
Mon beau pays s’appelle Euskal-Herri
J’ai dans le sang une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent
On ne peut pas renier sa patrie
Tant que l’on garde une pointe d’accent

Chantons la langue avec Manu Militari

Manu Militari, «Je me souviens», 2012, illustration

(Il n’y a pas que «La langue de chez nous» dans la vie. Les chansons sur la langue ne manquent pas. Petite anthologie en cours. Liste d’écoute disponible sur Spotify. Suggestions bienvenues.)

 

Manu Militari, «Je me souviens», 2012

 

On met l’cap sur un rêve mais la traversée est longue
Combien trépassent avant d’toucher l’Nouveau-Monde
On est Breton, Normand, Irlandais
Ou peu importe, on s’mélange espérant vivre en paix

Grand-maman dit même qu’on a du sang amérindien
J’me demande si on n’a plus dans nos veines ou sur nos mains
On fait une guerre, on la perd, j’me sens trahi
Comme un flo rejeté par sa mère patrie

Mes nouveaux maîtres m’exploitent, j’commence à être écœuré
J’m’en remets à Dieu mais entre nous deux y a monsieur l’curé
Chaque jour j’laboure une terre qui m’appartenait
Chaque nuit j’rêve de violer leur accord de paix

Ma fierté est à poil et des mains sales la tripotent
J’prends les armes en r’joignant les Patriotes
Mais pendant qu’on pend mes chefs au Pied-du-Courant
Ma maison brûle sur les rives d’un Richelieu rouge sang

On m’a volé ma victoire
Craché sur c’que j’avais d’histoire
Mais j’me souviens d’où j’viens
Pourquoi jamais j’me suis battu pour rien
Parce qu’on m’a volé volé ma victoire
Craché sur c’que j’avais d’histoire
Mais j’me souviens d’où j’viens
Je me souviens

J’voudrais grimper la montagne mais y en a pas d’facile
Quand ta langue t’empêche de sortir du bas d’la ville
Faique j’me barre le dos dans leurs vieilles usines
Et la reine récolte le miel que les Queb’ butinent

Moi j’mets la table, chu remercié qu’par des miettes
J’prends des balles pour leur empire sur les plages de Dieppe
Quand une voix mondiale s’lève comme un souffle d’après-guerre
Elle dit qu’elle veut sa liberté pis qu’aucune arme la f’rait taire

Sur toute la terre les rebelles montent le ton
Mais plus les idées sont belles moins les méthodes le sont
Moi j’reste tranquille mais pense pas que j’ferme ma trappe
J’manifeste trempé jusqu’aux os sous une pluie d’matraques

J’gagne du terrain j’ai p’t’être pas toutes mes droits
Mais j’peux presque sentir mon rêve au bout d’mes doigts
On m’dit tu veux ton pays, vote pour qu’ça dépende de toi
L’occasion se présente deux fois

On m’a volé ma victoire
Craché sur c’que j’avais d’histoire
Mais j’me souviens d’où j’viens
Je me souviens

D’mande-toi pas pourquoi y a encore des gens qui s’battent
Quand dans leur propre pays leur langue reste un handicap
Et si tu cherches des preuves, elles s’révèlent parfois
Mais la majorité du peuple est aveugle par choix

La planète tourne autour d’une seule musique
Moi j’refuse d’accorder ma voix avec leur pensée unique
J’veux rester qui j’suis, j’veux qu’tu restes qui t’es
If you don’t understand me on va devoir s’quitter

Moi ma langue est sous respiration subventionnée
Je l’sais c’est pas d’ta faute si on aime pus qui on est
Pour qu’les radios jouent du francophone faut les pousser
Notre culture est une vieille fille que personne veut épouser

Même nous on danse avec une autre dès qu’on a la chance
Combien d’Queb’ renient leur accent en France
Combien disent c’est pas grave, fais-en pas toute une montagne
Quand depuis 1759 moi j’ai perdu mon calme

Mais j’ai volé les Hurons
Et autres peuples qu’eux seuls s’rappellent du nom
Abénaquis, Iroquois, Micmacs et Cris
Ainsi l’histoire s’écrit

Les canons parlent, ceux qui en ont pas font d’la place
Mais comme dirait Vigneault toutes les humains sont d’ma race
Demain j’m’éteindrai face à d’autres tribus qui naissent
J’me souviendrai qu’nos différences sont richesse

 

P.-S.—On ne confondra pas «Je me souviens» (ici) et «Je me souviens» ().