His Bobness à l’aréna

Les deux joueurs de hockey préférés de Bob Dylan selon le magazine Interview, 2012

En 2012, Bob Dylan donne une entrevue au magazine Interview. Dans «New Again : Bob Dylan», on apprend, sous la plume de Scott Cohen, que le chanteur a deux joueurs de hockey préférés : Sammy Williamson et Maurice «The Rocket» Richard.

Pour Richard, l’Oreille tendue voit à peu près de qui il s’agit.

Mais Sammy Williamson ? Il doit s’agir du Sam Williamson qui a joué, en 1951-1952, pour les Flyers de Hibbing, puisque Dylan a grandi dans cette ville du Minnesota. C’est un enfant qui aurait vu jouer Williamson; Dylan avait alors dix ans.

À chacun ses héros.

P.-S.—L’Oreille a appris l’existence de cet entretien grâce à un tweet de Jean-François Proulx. Merci.

Plaisir solitaire

Maurice Richard et Stan Fischler, Les Canadiens sont là !, 1971, couverture

En 1971, chez Prentice-Hall of Canada, dans une traduction de Louis Rémillard, paraît le livre Les Canadiens sont là ! La plus grande dynastie du hockey. En couverture, deux noms pour un seul auteur, «par Maurice “Rocket” Richard et Stan Fischler» : Maurice Richard est un joueur de hockey; Stan Fischler, un très prolifique journaliste sportif. (Il est arrivé, à l’occasion, à l’Oreille tendue de parler de Richard.)

Dans sa livraison de juillet 1971, le Magazine Maclean publie une publicité pour l’ouvrage (p. 39).

Le Magazine Maclean, juillet 1971, publicité pour Les Canadiens sont là !

Comment l’éditeur entend-il appâter le chaland ?

En proposant une «version authentique» de la «belle carrière» de Richard, parfois ramené à son seul prénom, «Maurice».

En promettant un texte enlevant : «Captivant, le récit bondit au rythme du hockey lui-même; rapide, imprévisible, tout comme l’équipe; tout comme le plus grand de ses joueurs»; «Plus de 20 grandes illustrations et 300 pages pleines de mouvement vous placeront au beau milieu de la patinoire.»

En offrant la possibilité à l’acheteur de retourner le livre pour quelque raison que ce soit : «J’examinerai ce livre chez moi pendant dix jours. Si je décide de ne pas le conserver, je pourrai vous renvoyer le livre, et mon argent [6,95 $] me sera intégralement remboursé.» Il n’y a rien à craindre : «COMMANDEZ VITE ! OFFRE SÛRE !»; «sans aucun risque !»; «votre commande est entièrement garantie !»; «Examinez ce livre pendant 10 jours sans risque !»; «GARANTIE DE REMBOURSEMENT !»

Surtout, en suggérant un plaisir solitaire : «“Les Canadiens sont là” est un livre passionnant, que vous tiendrez à lire vous-même.» Personne ne le lira à votre place ! C’est toujours bon à savoir.

 

Référence

Richard, Maurice et Stan Fischler, Les Canadiens sont là ! La plus grande dynastie du hockey, Scarborough, Prentice-Hall of Canada, 1971, vii/296 p. Ill. Traduction de Louis Rémillard.

Il faut toujours dire la vérité aux enfants

Lucie Papineau, la Légende de Maurice Richard, 2020, couverture

Ses lecteurs le savent : l’Oreille tendue a consacré beaucoup de temps à Maurice Richard — c’est du hockey. (Voir ici.)

Apprenant la parution de la Légende de Maurice Richard, le petit garçon qui devint le Rocket, un album destiné aux «3 ans et +», signé par Lucie Papineau (aux textes) et Caroline Hamel (aux dessins), elle est donc allée jeter un œil. Elle ne s’attendait évidemment pas à des révélations — elle en a passé l’âge —, mais elle a quand même été étonnée par autant d’erreurs et d’imprécisions en si peu de pages.

La publicité représentée p. 8, celle de Dr Pepper, comporte le slogan «Tree good times»; ce devrait être «Three good times». À la page suivante, il y a «Bigger. Bitter», alors que ce devrait être «Bigger. Better».

En mars 1955, Richard n’est pas suspendu que pour «toute la durée des éliminatoires» (p. 30); il l’est aussi pour les trois derniers matchs de la saison régulière, ce qui le privera du championnat des marqueurs. Le 18 du même mois, quand il s’adresse à ses partisans, à la suite de l’Émeute de la veille, c’est à la radio (p. 31), mais aussi à la télévision.

Il n’est pas nommé au Temple de la renommée du hockey en 1960 (p. 33), mais en 1961. Son chandail, le numéro 9, a été retiré par les Canadiens de Montréal (p. 33), mais pas par toutes les équipes de la Ligue nationale de hockey.

Ça fait un brin désordre, tout ça

 

Référence

Papineau, Lucie, la Légende de Maurice Richard, le petit garçon qui devint le Rocket, Montréal, Auzou, 2020, 35 p. Illustrations de Caroline Hamel.

L’oreille tendue de… Yvon Lambert et Guy Lapointe

Denis Richard, en collaboration avec Léandre Normand, Henri Richard. La légende aux 11 coupes Stanley, 2020, couverture

«La scène se passe dans une petite taverne située près du camp d’entraînement des Canadiens, qui se tient à Kentville, en Nouvelle-Écosse, à l’automne 1971. Tendant l’oreille vers la table voisine, nos deux moineaux [Yvon Lambert et Guy Lapointe] entendent Henri Richard lancer à un autre joueur, assis avec lui, “qu’une jeune recrue qui n’est pas capable de se taper cinq-six bières par jour n’a pas sa place dans le club”.»

Denis Richard, en collaboration avec Léandre Normand, Henri Richard. La légende aux 11 coupes Stanley, préface de Ronald Corey, avant-propos de Léandre Normand, Montréal, Éditions de l’Homme, 2020, 234 p., p. 209.

À lire jusqu’à la fin

Église St. Michael, Montréal

Carnet d’un promeneur dans Montréal (2020), de Dinu Bumbaru, est un beau livre, plein d’informations et de découvertes.

Formé en architecture et en conservation, Bumbaru défend le patrimoine montréalais depuis plusieurs années, notamment à Héritage Montréal. Il se déplace à pied et en autobus (p. 13, p. 75, p. 93) et, de ses promenades, il a rapporté des milliers de dessins; il en donne près de 200 à voir dans ce livre, qu’il accompagne de courts textes.

Sans élever le ton, il suit l’évolution de l’occupation de l’espace montréalais. Il ne semble guère enthousiaste devant le nouveau Centre hospitalier de l’Université de Montréal (p. 18, p. 61, p. 69), mais il apprécie l’édifice des Hautes études commerciales (p. 133). Il a ses lieux de prédilection : Outremont, l’avenue du Parc, le boulevard Saint-Laurent. Par touches brèves, il fait renaître des lieux disparus (p. 24, p. 79, p. 171), il s’inquiète de l’avenir (p. 52, p. 102, p. 188), il critique (p. 77, p. 85, p. 120, p. 126, p. 165, p. 198), il rappelle l’histoire de l’architecture de la ville (noms propres, dates, événements). Il saisit aussi bien le modeste alignement de balcons à Outremont (p. 111) que la place de l’oratoire Saint-Joseph dans le paysage monumental (p. 191-193). Et, surtout, ces choses vues (Victor Hugo est en épigraphe) donnent le goût de découvrir certains sites ou de retourner voir avec de nouveaux yeux des lieux connus.

Ce promeneur est sensible au concret et, donc, aux bagels. Sans aller jusqu’à comparer les new-yorkais aux montréalais, il évoque les «bageleries» où on les cuisine (p. 75) et une église qui les honorerait. Qui ne lirait pas l’ensemble du livre pourrait s’interroger sur l’existence de l’«église St. Michael of the Bagels», dans le Mile End (p. 117). On apprend plus tard qu’il s’agit «de l’église St. Michael dite “of the Bagels”» (p. 140). Ce «dite» change considérablement la perspective religieuse.

Voilà une autre bonne raison de lire Dinu Bumbaru jusqu’à la fin.

 

Illustration : église St. Michael, photo déposée sur Wikimedia commons

 

Référence

Bumbaru, Dinu, Carnet d’un promeneur dans Montréal, Montréal, La Presse, 2020, 198 p. Ill.