Autopromotion 371

Un écrivain taillant sa plume, tableau de Jan Ekells, 1784

L’Oreille tendue, pour la première fois de sa longue carrière de professeure d’université, a donné récemment un cours de création littéraire. Ce cours portait sur le blogue.

Elle a tenu son journal de cette expérience d’enseignement. Ça se lit ici, chez les amis de la revue numérique Sens public.

 

Référence

Melançon, Benoît, «Le blogue à l’université. Journal d’un enseignement», Sens public, revue numérique, rubrique «Chroniques», 5 juillet 2018.  http://sens-public.org/article1333.html

 

Illustration : Un écrivain taillant sa plume, tableau de Jan Ekells, 1784, Rijksmuseum, Amsterdam

Accouplements 118

Boîte de friandises Cracker Jack

(Accouplements : une rubriquel’Oreille tendue s’amuse à mettre en vis-à-vis deux œuvres, ou plus, d’horizons éloignés.)

Mavrikakis, Catherine, les Derniers Jours de Smokey Nelson, Montréal, Héliotrope, 2011, 303 p.

«Dis-moi, juste de toi à moi : tu l’as trouvé dans une boîte de Cracker Jack, ton permis ?» (p. 15)

La Charité, Claude, le Meilleur Dernier Roman, Longueuil, L’instant même, 2018, 177 p. Ill.

«L’institution universitaire avait eu plus que son lot de ces aventuriers de la vérité mesurable en beaux billets du dominion. Aussi, notre assemblée départementale avait-elle inscrit à l’ordre du jour une proposition de doctorat honoris causa. Les collègues les plus attachés aux traditions avaient tenu au latinisme pour bien marquer notre dissidence par rapport à la logique ambiante des docteurs honorifiques trouvant leur parchemin à sceau dans une boîte de Cracker Jack, après avoir promis un généreux don à la fondation de l’université qu’ils versaient a posteriori pour éviter toute impression de conflit d’intérêts, même s’ils étaient passés maîtres sinon docteurs en la matière» (p. 82).

P.-S.—Au Québec, les boîtes de friandises Cracker Jack pourraient donc contenir aussi bien des permis de conduire que des doctorats honoris causa. Ce n’est pas rassurant.

 

[Complément du 25 octobre 2024]

Peirano, Arlette et Louise Fournier, Esclavardage (une arobase entre nous), Nouméa, Pearl édition, 2006, 330 p.

«Hey ! Mais ma parole, tu as eu ton permis de conduire dans une boîte de Cracker Jack, espèce de chauffeur du dimanche !» (p. 87)

Fin de série

L’Oreille tendue enseigne à l’université depuis 1981. Ce matin, pour la première fois en 37 ans, elle s’est présentée en classe sans ses notes de cours et sans les copies qu’elle devait rendre. Tout ça était resté chez elle.

Dites, docteur, c’est grave ?

Faire un mauvais bond

C’était le 13 octobre 2009 : l’Oreille tendue évoquait un verbe très prisé en colloque universitaire, rebondir.

Depuis, certain de ses collègues, qui fréquente beaucoup les colloques, aime réagir publiquement quand il entend ce verbe.

https://twitter.com/monterosato/status/979303697959280640

L’Oreille ne connaissait le verbe qu’à l’oral. Hier, elle l’a découvert à l’écrit, sur Twitter.

https://twitter.com/VRobertParis3/status/990920789653409792

On n’arrête pas le progrès.

Les littéracies universitaires par l’exemple

Comment évaluer une revue scientifique ?

«Par ma foi !
il y a plus de quarante ans que je dis de la prose
sans que j’en susse rien,
et je vous suis le plus obligé du monde
de m’avoir appris cela.»
Molière, le Bourgeois gentilhomme, acte II, sc. IV

Pas plus tard qu’hier, rendant compte de l’ouvrage Écriture scientifique, écriture sous contraintes ?, l’Oreille tendue signalait l’importance qu’elle accordait aux littéracies universitaires.

Premier rappel, sous forme de citation de Carole Glorieux : «Le champ des littéracies universitaires est un champ en construction qui traite de l’appropriation et de la maîtrise, par les étudiants, des discours universitaires, ce qui sous-tend non seulement l’apprentissage de pratiques lecturo-scripturales mais implique aussi la prise en compte d’un certain type de rapport à l’écrit universitaire» («La question du brouillage des désignations dans les mémoires d’application en journalisme», p. 119-133, p. 119 n. 2).

Second rappel, sous forme d’autocitation : Allons plus loin. Le travail nécessaire sur les littéracies universitaires, qui portent sur l’écrit, ne peut suffire à lever le voile sur ce qu’est le monde de la recherche. Avec les étudiants des cycles supérieurs, il faut aussi traiter des pratiques de sociabilité (le colloque, la soutenance de thèse) et du fonctionnement des institutions universitaires (l’évaluation par les pairs, le monde de la publication savante, la structuration des carrières). Entrer en thèse, c’est se trouver devant tout cela.

Il se trouve que l’Oreille donne depuis plusieurs années un séminaire obligatoire pour tous les nouveaux doctorants du département de lettres françaises où elle enseigne. Pendant longtemps, ce séminaire s’est appelé «Séminaire de méthodologie». Pour des raisons qu’il serait trop long d’exposer ici, il s’appelle maintenant «Séminaire collectif de doctorat». L’Oreille y aborde toujours des questions de méthodologie, mais elle a voulu donner à son enseignement une tournure «professionnalisante». Sans le savoir, elle traitait de littéracies universitaires.

Qu’est-ce à dire ? Voyons quelques sujets abordés dans ce séminaire, dans le désordre et sans exhaustivité. Tous ne sont pas abordés tous les ans et ils sont déterminés par les compétences de l’Oreille (elle ne sait pas coder, par exemple).

Wikipédia : son fonctionnement; son utilisation en thèse; son intérêt pour l’écriture de vulgarisation.

La communication scientifique : en colloque (le respect des consignes, le bon usage des supports visuels, les nouvelles formes de rencontres); dans les médias; devant le grand public.

La rédaction scientifique : outils d’aide (imprimés, en ligne); formations; modes de collaboration (les ateliers de rédaction); styles et formes (la proposition de communication ou d’article, le compte rendu, l’article, etc.).

L’édition savante : remarques historiques; publish or perish; évaluation par les pairs (description, critique, transformation); autorité et légitimité; libre accès; livres, articles, chapitres de livres; blogues et réseaux sociaux; passage de la thèse au livre.

Le numérique : nouveaux corpus; nouveaux modes d’édition; nouveaux types d’écriture; nouvelle conception de la recherche (recherche collective et recherche individuelle).

Carrières universitaires (modes de recrutement; évolution des carrières) et non universitaires.

La première séance s’ouvre sur une discussion libre, inspirée de textes de François Bon, d’Arnaud Maïsetti et de Thibault Le Hégarat, durant laquelle les étudiants et le professeur doivent répondre à une seule question : concrètement, avec quels outils numériques travaillez-vous au quotidien ? (C’est passionnant.)

L’Oreille reste tendue : que traiteriez-vous dans ce genre de séminaire ? Les commentaires sont ouverts.

P.-S.—Oui, en effet, on voit probablement plus souvent littératie que littéracie.

P.-P.-S.—Ce ne sont pas les lectures qui manquent en ce domaine (voir ici).

 

Référence

Gravet, Catherine (édit.), Écriture scientifique, écriture sous contraintes ?, Mons, Université de Mons, Service de Communication écrite, coll. «Travaux et documents», 5, 2014, 145 p. Ill.