Les zeugmes du dimanche matin et de Fabrizio Bucella

Fabrizio Bucella, Pourquoi boit-on du vin ?, éd. de 2021, couverture

«En effet, les membres du jury mettent une note sur dix en plus du cœur à l’ouvrage» (p. 132).

«Les Carmes Haut-Brion, famille Pichet, sortent de leur poche Philippe Starck et le chéquier» (p. 207).

«Très vite, l’ensemble de l’aristocratie bordelaise mettra la main au portefeuille et la pioche dans la terre» (p. 216).

«Après avoir réalisé le tour des vignobles et de la question, l’auteur n’a pas trouvé l’oracle […]» (p. 263).

Fabrizio Bucella, Pourquoi boit-on du vin ? Une enquête insolite et palpitante du prof. Fabrizio Bucella, Malakof, Ekho, 2021, 286 p. Ill. Édition originale : 2019. Préface d’Alexandre Abellan.

 

P.-S.—Vous ne connaissez pas le professeur Bucella, ses «Salukes !» et sa passion du zeugme ? Vous devriez. Commencez par ici.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

La clinique des phrases (115)

La clinique des phrases, Charles Malo Melançon, logo, 2020

(À l’occasion, tout à fait bénévolement, l’Oreille tendue essaie de soigner des phrases malades. C’est cela, la «Clinique des phrases».)

Soit cette phrase, tirée d’un roman policier québécois :

Il lui arrivait d’aller prendre un verre avec des collègues, de participer à un tournoi de baseball ou à une partie de pêche, mais il ne se sentait proche d’aucun des fêtards qui remplissaient son verre ou lui criaient de se grouiller le cul afin d’atteindre le deuxième but avant le champ arrière de l’équipe adverse.

Les amateurs de sport le savent : il n’existe pas de champ arrière au baseball; c’est un terme de football. En revanche, en langue de balle, on connaît le champ extérieur.

On pourrait donc imaginer la phrase suivante :

Il lui arrivait d’aller prendre un verre avec des collègues, de participer à un tournoi de baseball ou à une partie de pêche, mais il ne se sentait proche d’aucun des fêtards qui remplissaient son verre ou lui criaient de se grouiller le cul afin d’atteindre le deuxième but avant le champ extérieur de l’équipe adverse.

Elle resterait bizarre. Il faudrait la modifier plus profondément :

Il lui arrivait d’aller prendre un verre avec des collègues, de participer à un tournoi de baseball ou à une partie de pêche, mais il ne se sentait proche d’aucun des fêtards qui remplissaient son verre ou lui criaient de se grouiller le cul afin de ne pas être retiré au deuxième but par le champ extérieur de l’équipe adverse.

À votre service.

Fil de presse 046

Charles Malo Melançon, logo, mars 2021

Lire linguistique ? Allez-y !

Betz, Simon, Bogdan Ludusan et Petra Wagner (édit.), Disfluency in Spontaneous Speech, Bielefeld, Germany. 28-30 August 2023, 2023.

Cassin, Barbara, le Livre d’une langue, Paris, Éditions du patrimoine, 2023, 312 p.

Fouché, Pierre, Traité de prononciation française, Paris, Klincksieck, coll. «Linguistique», 2023, 592 p. Réimpression de l’édition de 1988.

Fridland, Valerie, Like, Literally, Dude. Arguing for the Good in Bad English, Viking, 2023, 336 p.

Gaudin, François (édit.), Alain Rey. Lumières sur la langue, Paris, Honoré Champion, coll. «Lexica — Mots et dictionnaires», 43, 2023, 282 p.

Gauvin, Lise, Des littératures de l’intranquillité, Paris, Karthala, coll. «Lettres du Sud», 2023, 236 p.

Giguère, Frédéric, «Et si Lord Durham avait raison ? L’hétérolinguisme au cœur du rap québécois contemporain», Waterloo, Université de Waterloo, mémoire de maîtrise, 2020, vii/111 p. Dir. : Nicole Nolette.

Gilbert, Muriel et Jean-Christophe Establet, Joyeuses fautes. Le premier roman-photo de l’orthographe, Paris, Le Robert, 2023.

Glottopol. Revue de sociolinguistique en ligne, 38, 2023. Dossier «Les langues dans la famille».

Glottopol. Revue de sociolinguistique en ligne, 39, 2023. Dossier «Altera lingua ou la construction sociale de l’altérité linguistique».

Gougenheim, Georges, la Langue populaire dans le premier quart du XIXe siècle d’après le Petit dictionnaire du peuple de J.-C.-L.-P. Desgranges (1821), Orléans, Corsaire éditions, 2022, 254 p., Préface de Fabrice Jejcic.

Jaubert, Anna, la Stylisation du discours, Paris, Classiques Garnier, coll. «Investigations stylistiques», 15, 2023, 290 p.

Lecherbonnier, Bernard, Philippe Rossillon, l’inventeur de la Francophonie, Paris, Descartes & cie, 2023, 200 p.

Makan, Abdeltif (édit.), Migrations de langues et des cultures dans la littérature et dans l’art, Université Sultan Moulay Slimane (Maroc), 2023, 228 p.

Merlo, Jonathan-Olivier, Par monts et par mots. Pour un itinéraire sociolinguistique de la francophonie, Bruxelles, Berlin, Berne, New York, Oxford, Vrasovie et Vienne, Peter Lang, coll. «Champs didactiques plurilingues : données pour des politiques stratégiques», 16, 2023, 122 p. Ill.

Mustill, Tom, Comment parler baleine. L’incroyable avenir de la communication animale, Paris, Albin Michel, 2023, 416 p. Traduction de Marina Boraso.

Ozoux, Mireille, Jonathan Swift linguiste. La norme et le jeu, Paris, Honoré Champion, coll. «Littérature étrangère», 37, série «Littérature anglaise», 2023, 458 p. Préface de Jean Viviès.

Pouvoirs, 186, 2023, 192 p. Dossier «La langue française».

Le fumeur musical expérimenté

Publicité des cigarettes Buckingham avec le joueur de hockey Pit Lépine, la Presse, 11 février 1928

Dans la Presse+ d’hier, cette phrase : «Vivre avec une étiquette. Jonathan Sénécal connaît le tabac.» (Sénécal joue au football pour les Carabins de l’Université de Montréal.)

Au Québec, qui connaît le tabac est réputé avoir de l’expérience et tirer des leçons de celle-ci.

Autre exemple, chez Michel Tremblay : «C’est alors que Santuzza fit son entrée. Vêtue, elle, de noir, des pieds à la tête. La special guest connaissait le tabac !» (p. 84)

On l’aura compris : ce tabac est de même nature que la musique dans connaître la musique.

 

Référence

Tremblay, Michel, Offrandes musicales. Récits, Montréal et Arles, Leméac et Actes Sud, 2021, 165 p.

Les zeugmes du dimanche matin et de Benjamin Hoffmann

Benjamin Hoffmann, l’Île de la Sentinelle, 2022, couverture

«Aussitôt le canot a fait demi-tour, emportant l’ancien monarque à l’abri, vers le confort de son navire et les neuf années qu’il lui restait à vivre» (p. 172).

«Les enquêteurs ont fouillé à travers l’océan Indien et dans le passé du pilote, exhumant des détails troublants qui n’ont rien démontré de façon définitive» (p. 215).

Benjamin Hoffmann, l’Île de la Sentinelle. Roman, Paris, Gallimard, coll. «Blanche», 2022, 376 p.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)