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Alex Gagnon, les Déchirures, 2023, couverture

À ses heures perdues, l’Oreille tendue est éditrice conseil : elle a accompagné des livres aux Presses de l’Université de Montréal et chez Del Busso éditeur.

Paraît aujourd’hui, dans ce cadre, le plus récent ouvrage d’Alex Gagnon, les Déchirures. Essai sur le Québec contemporain.

 

Quatrième de couverture

Le Journal de Montréal et la «rectitude politique», Mathieu Bock-Côté et les visages contemporains de la gauche, l’affaire du «mot-en-n» et la liberté académique : cet essai braque les lumières de l’analyse du discours sur quelques-unes des polémiques passionnées qui marquent le Québec actuel.

Les polémiques et les débats publics sont comme des orchestres. Mais ce sont des orchestres sans chef où les instruments sont désaccordés, où les harmonies sont brisées par la dissonance et où les musiciens, qui exécutent en chœur des partitions différentes, cherchent à s’enterrer les uns les autres.

Alex Gagnon se met à l’écoute de cette cacophonie pour en saisir les notes, les gammes, les progressions et les refrains. Il décrypte les attitudes rhétoriques du conservatisme et du progressisme. Il décompose les dialogues de sourds pour en révéler les mécanismes. Il tente de comprendre les ressorts de la polarisation. Et c’est le fondement même de notre condition sociale que son exploration nous pousse finalement à interroger.

Alex Gagnon a reçu de nombreuses distinctions pour ses trois premiers livres : La communauté du dehors (PUM, 2016), Nouvelles obscurités (Del Busso, 2017) et Les métamorphoses de la grandeur (PUM, 2020). Il est chargé de cours, chercheur et essayiste. Ses travaux portent principalement sur l’histoire des imaginaires sociaux et des sensibilités.

 

Table des matières

Présentation

1. Le Journal de Montréal et la «rectitude politique». L’éclaireur et le curé

Sémantique du «gnangnan»

Rhétorique du coup de gueule

La force du vraisemblable

Un phare dans la nuit

L’art presque perdu de la circonspection

Deux solitudes

Le grand défoulement

2. Le «tempérament» antimoderne de Mathieu Bock-Côté. Le noble et l’infréquentable

«Ainsi donc». Un discours enthymématique

Autoportrait d’un conservateur

Lire ou ne pas lire Mathieu Bock-Côté ?

3. Le dominant, c’est l’autre. Le dissident et le fasciste

Anatomie d’un «manifeste»

Anatomie d’une réplique

Un «dialogue de sourds»

4. Quand dire, c’est taire. Essai en treize actes

Finale. Le conflit des représentations

Le monde social : un espace

L’espace social : classer et être classé

La lutte des classements : une polémique perpétuelle

Remerciements

 

Référence

Gagnon, Alex, les Déchirures. Essais sur le Québec contemporain, Montréal, Del Busso éditeur, 2023, 347 p.

Tataouinage baseballistique

Baseball, dessin de presse, 1901

Soit la phrase suivante, tirée de la Presse+ du jour : «De nouvelles tactiques, comme la multiplication des releveurs, ont ralenti le rythme du jeu. Mais le vrai coupable, c’est le tataouinage.»

Elle demande deux explications.

Les tactiques dont il est question sont celles des joueurs de baseball. Elles ont pour effet d’allonger indûment les matchs. La direction des ligues majeures vient d’imposer de nouvelles règles pour y mettre fin.

Le tataouinage, dans le français populaire du Québec, désigne le fait de prendre trop de temps, de ralentir une action, de perdre et de faire perdre son temps. Pierre Corbeil parle de «complication inutile» (p. 37); Léandre Bergeron, de «niaisage» (p. 481).

À votre service.

 

P.-S.—Oui, on peut dire des personnes qui tataouinent qu’elles brettent.

P.-P.-S.—Le Fichier lexical du Trésor de la langue française au Québec propose 33 citations comportant tataouinage.

 

[Complément du 9 décembre 2024]

Un lecteur de l’Oreille lui indique l’étymologie proposée par la suite logicielle Antidote :

Remarque. — Le verbe québécois tataouiner résulte probablement du croisement de dérivés dialectaux du verbe tâter. Son sens correspond, de fait, à celui généralement véhiculé par ces dérivés, soit «faire de petits aller-retour (physiques ou mentaux)», qui constitue une extension du sens «toucher plusieurs fois avec les mains» de tâter. Ainsi, en gallo, on a tantouiller (ou tantouillë) «agiter un objet dans l’eau ou dans la boue». En normand, on a tatouiller «barbouiller». Dans la même langue, on a enfin tatiner «marchander à l’excès». Les meilleurs candidats pouvant prétendre à la paternité du mot québécois sont tatouiller et tatiner.

Merci.

 

Références

Bergeron, Léandre, Dictionnaire de la langue québécoise, Montréal, VLB éditeur, 1980, 574 p.

Corbeil, Pierre, Canadian French for Better Travel, Montréal, Ulysse, 2011, 186 p. Ill. Troisième édition.

Les zeugmes du dimanche matin et de Kevin Lambert

Kevin Lambert, Que notre joie demeure, 2022, couverture

«Par fidélité envers ses déceptions d’enfance, Gabriela a souhaité devenir architecte, continuant de se traîner sur cette voie souffrante où l’imagination volante et libre rencontre la concrétude du dessin, les limites des matériaux et des capacités humaines» (p. 51).

«“le Capital [de Marx] épuise trois choses : la nature, la force de travail et mes nerfs”» (p. 64).

«Dina sait qu’elle fait plaisir à son amie en lui donnant accès à un monde qu’elles ont fantasmé adolescentes et que Dina a fini par gagner à force d’efforts, en fabriquant des puces électroniques, des connecteurs mémoriels et sa propre chance» (p. 74).

«De longues larmes de gratitude et de vin blanc roulent sur ses joues» (p. 85).

Kevin Lambert, Que notre joie demeure, Montréal, Héliotrope, 2022, 381 p., p. 51.

 

P.-S.—L’Oreille tendue a cessé sa collecte à la centième page.

 

(Une définition du zeugme ? Par .)

Les cendres de René Lévesque

Cendrier et cigarettes, Musée de la civilisation, Québec, 19 février 2023

Il y a plusieurs lustres, l’Oreille tendue a visité le pavillon de Flaubert à Croisset; elle a raconté son expérience ici.

Hier, elle était au Musée de la civilisation à Québec. Elle y a vu trois expositions : le Temps des pharaons; Ô merde !; René et Lévesque.

Dans la troisième, on ne cesse de rappeler que l’ancien premier ministre du Québec fumait beaucoup. Pour être bien sûr que le public a compris, l’exposition donnait à voir plusieurs «articles de fumeur», comme on dit en nos contrées : cigarettes, paquets de cigarettes, et deux cendriers, dont au moins un n’a strictement rien à voir avec Lévesque.

Un verre de «poète», c’est beaucoup; deux cendriers de premier ministre, c’est trop.