À plus tard, du passé

Maxime Raymond Bock, Morel, 2021, couverture

À quelques reprises, en ces lieux, l’Oreille tendue a vu réapparaître des mots ou expressions de son passé : barda, ça fera, nono, poche, Rhodésien, trimpes, etc.

Elle est aussi retombée en enfance, façon de parler, en lisant, dans Morel (2021), de Maxime Raymond Bock, les phrases suivantes : «Vous vous reprendrez un autre tantôt, Jean-Claude. Va t’amuser» (p. 48). Elle n’avait pas entendu cet autre tantôt (mis pour autre fois) depuis des décennies.

Elle en a été émue.

P.-S.—L’Oreille tendue a présenté Morel le 12 janvier 2022.

 

Référence

Raymond Bock, Maxime, Morel. Roman, Montréal, Le Cheval d’août, 2021, 325 p.

Secours indispensable

Michel Tremblay, Bonbons assortis, éd. de 2017, couverture

De l’anglais au français de référence, le spare tire devient un pneu de rechange / de secours. En français populaire du Québec, on entendra aussi spare ou tire / pneu de spare, prononcé à l’anglaise (spère / spére).

Spare n’a pas qu’un sens automobile. Deux exemples.

Dans Morel (2021), Maxime Raymond Bock évoque une famille recomposée et son «grand-père de remplacement fort convenable, le grand-spare» (p. 193).

Dans Bonbons assortis (2002), Michel Tremblay décrit une mauvaise plaisanterie de Noël :

— Le père Noël avait peut-être une brique de spare
— Une brique de quoi ?
— J’voulais dire une deuxième brique. Une brique au cas où y perdrait la première… (éd. de 2017, p. 102).

Vous le voyez : il est bon d’être prévoyant.

P.-S.—L’Oreille tendue a présenté Morel le 12 janvier 2022.

 

Références

Raymond Bock, Maxime, Morel. Roman, Montréal, Le Cheval d’août, 2021, 325 p.

Tremblay, Michel, Bonbons assortis. Récits, Montréal, Leméac, coll. «Nomades», 2017, 152 p. Édition originale : 2002.

Encore une histoire de poche

L’Oreille tendue — Dieu sait pourquoi — vous entretient souvent de poche. Elle vous a parlé d’une chose poche, de la poche abritant un fou, de l’enveloppe cutanée des testicules. Aujourd’hui, ce sera la petite poche, qui paraît exister en deux variétés.

Dans le domaine du sport, mettre quelqu’un dans sa petite poche désigne le fait de dominer quelqu’un outrageusement. Dans le match des Canadiens de Montréal — c’est du hockey — du 28 décembre 2021, le défenseur David Savard a habilement déjoué un rival du Lightning de Tampa Bay, Victor Hedman. Il lui a fait prendre une tasse de café. Réaction, sur Twitter, d’un journaliste de la Presse+ :

 

 

Toujours au hockey, les personnes âgées — l’Oreille, par exemple — se souviendront que, en 1981, un gardien de but des Canadiens, Richard Sévigny, avait annoncé, avant une série contre les Oilers d’Edmonton, que son coéquipier Guy Lafleur allait mettre Wayne Gretzky «dans sa petite poche». Mal lui en prit.

Lisant Morel (2021), de Maxime Raymond Bock, l’Oreille découvre que l’expression peut avoir un sens diamétralement opposé et marquer l’affection.

Morel a tenu à apporter un petit coffre à outils pour cette entreprise, sur lequel André est resté assis tout au long du voyage à l’arrière de la Station, c’est un exploit qu’il n’ait pas chialé continuellement, le cul sur la poignée de métal, ce doit être l’influence de sa grand-mère Madeleine, qui, avec ses formules magiques et ses bonbons au beurre, l’a dans sa petite poche de tablier depuis toujours (p. 212-213).

Tant de mystères, si peu d’heures.

P.-S.—Il manque encore au plus fort la poche. Ce sera pour un autre jour.

P.-P.-S.—L’Oreille tendue a présenté Morel le 12 janvier 2022.

 

Référence

Raymond Bock, Maxime, Morel. Roman, Montréal, Le Cheval d’août, 2021, 325 p.

Mises à jour du samedi glacial

Mises à jour, Charles Malo Melançon, logo, 2021

De l’article Alzheimer

De l’article Apparence que

De l’article Avoir de l’eau dans la cave

De l’article Bas du corps

De l’article Bazou

De l’article Bécosse

De l’article Bleuet, Casseau et Peanut

De l’article Blocs erratiques

De l’article Ça fera

De l’article Chapelets de sacres

De l’article Chicken (être ~)

De l’article Flaubert

De l’article Masques (au hockey)

De l’article Omicron

De l’article Oui (téléphonique)

De l’article Patiner sur la bottine

De l’article Pogo (dégelé ou pas)

De l’article Puck

De l’article Pure laine

De l’article Retarder le groupe

De l’article Zeugmes d’Hervé Le Tellier

De la dompe

L’espion qui m’a larguée / dompée, affiches, 2018

Dans des aventures antérieures, nous avons vu trois sens du verbe domper. Il est possible, pour une personne qui n’est plus amoureuse, d’en domper une autre (ici, ). Le verbe peut aussi désigner le fait de déposer quelqu’un (de ce côté, de l’autre). Il peut encore renvoyer à une pratique fort déplaisante au hockey; c’est alors de la langue de puck.

Il existe, à côté du verbe, un substantif : la dompe, en français populaire du Québec, c’est la décharge publique, le dépotoir.

«Entre le boisé et le champ, à une minute de marche, il y a la dompe, des tas d’immondices faites de conserves, de raccords de plomberie, de bouteilles brunes, de cendres, de chiens abattus, de pelures, de ciseaux cassés. Une fois par semaine, quelqu’un y met le feu pour l’hygiène» (Dée, p. 12).

«Ici, des rivières de hontes, de peines et de saletés, des rivières de rats, des dompes bourbeuses qui serpentent à travers les vies tranquilles de leurs riverains» (l’Habitude des ruines, p. 186).

Ce n’est généralement pas là qu’on laisse l’être non aimé : amoureusement, il est peu courant de domper à la dompe. De même, on ne voit pas pourquoi quiconque voudrait domper la puck à la dompe. En revanche, on peut plus facilement domper quelqu’un à la dompe.

À votre service.

 

Références

Delisle, Michael, Dée, Montréal, BQ, 2007, 128 p. Édition originale : 2002.

Voyer, Marie-Hélène, l’Habitude des ruines. Le sacre de l’oubli et de la laideur au Québec, Montréal, Lux éditeur, 2021, 211 p. Ill.