Cette publicité, dans la vitrine de l’épicerie près de chez l’Oreille tendue, il y a quelques jours :
Premier réflexe : qu’est-ce que ce «gluten free» qu’il n’y a pas dans le produit en montre («sans gluten free») ?
Deuxième réflexe : voilà ce que c’est que d’habiter une ville bilingue («sans gluten» / «gluten free»).
Toutes les occasions de citer Gaston Miron étant bonnes, saisissons celle-ci :
Dès que j’ai pu me rendre compte du monde extérieur, je trempais dans un environnement linguistique à prépondérance anglaise et bilingue, le français étant réservé à l’usage domestique. Ce chevauchement des deux langues, plus exactement d’une langue sur l’autre, finissait par composer une trame indifférenciée, les mots allaient par couples et ces paires de signes me saisissaient comme un seul signal. Door/porte, pull/tirer, pont/bridge, meat/viande, lundi/monday, péage/toll, men/hommes, address/adresse, merci/thank you, bienvenue/welcome, etc. Et j’étais cerné par l’affichage, l’annonce, la réclame. Le monde était tel, pensais-je (p. 222).
Référence
Miron, Gaston, «Le bilingue de naissance», Maintenant, 134, mars 1974; repris dans l’Homme rapaillé. Poèmes, préface de Pierre Nepveu, Montréal, Typo, 2005, 258 p. Édition originale : 1998.
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Dans le même genre, mais plus troublant encore pour un esprit prioritairement francophone, « vente de garage sale » (lu sur une affichette agrafée à un poteau de téléphone de la Petite-Patrie, il y a un deux ou trois ans).