C’était il y a plus de trente ans : l’Oreille tendue a un peu fréquenté André Belleau (1930-1986), à qui sera consacré un colloque la semaine prochaine. Souvenirs.
C’était au moment de la préparation du dossier de la revue Études françaises consacré à Mikhaïl Bakhtine en 1984. Belleau insistait pour que les titres des articles soient descriptifs, pas «jolis» ou «évocateurs». C’était, disait-il, pour aider les bibliographes. Leçon retenue. Merci.
Dans ses Cahiers de lecture, que conserve l’Université du Québec à Montréal, il est continuellement question de la grande fatigue du Belleau du début des années 1980. Quand on lui demandait s’il allait bien, il répondait souvent «Non». Il lui arrivait de recevoir ses visiteurs en robe de chambre. S’il vous visitait, après avoir ahané dans l’escalier, il fallait qu’il aille tout de suite «pisser», et il vous le laissait savoir. Il n’avait pas tout à fait la bonhomie de sa photo officielle, reproduite ci-dessus.
Dans son salon, sur une table, des livres et des revues, en piles, attendaient d’être lus. Belleau déplorait notamment le fait qu’il n’arrivait pas à suivre le rythme de publication de son ami Marc Angenot. Celui-ci publiait plus vite que celui-là ne lisait, disait-il.
Belleau avait du mal avec les noms propres. Le meilleur exemple est celui de Fredric Jameson, qu’il écrivait toujours «Frederic» avant le numéro «Bakhtine mode d’emploi». Dans ce numéro, l’orthographe était la bonne. Il était étonné de s’être trompé tout ce temps, et reconnaissant qu’on le corrige. Par la suite, il reviendra à «Frederic».
À un colloque à Québec, en avril 1985, Belleau présente un étudiant à la maîtrise au sociologue Fernand Dumont. L’étudiant, qui donnait alors sa première communication, aurait dû être plus impressionné.
André Belleau écrivait des lettres, celle-ci, par exemple.
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