Dans le Devoir du jour, l’Oreille tendue répond aux questions d’Éric Desrosiers sur les mots du sport au Québec.
Il est question de surf des neiges, de hockey et de baseball.
[Complément du jour]
Dans la foulée de cette entrevue, l’Oreille a discuté cet après-midi avec Catherine Doucet de l’émission de radio Place publique (Radio-Canada, Saguenay—Lac-Saint-Jean).
Dans des aventures antérieures, nous avons vu trois sens du verbe domper. Il est possible, pour une personne qui n’est plus amoureuse, d’en domper une autre (ici, là). Le verbe peut aussi désigner le fait de déposer quelqu’un (de ce côté, de l’autre). Il peut encore renvoyer à une pratique fort déplaisante au hockey; c’est alors de la langue de puck.
Il existe, à côté du verbe, un substantif : la dompe, en français populaire du Québec, c’est la décharge publique, le dépotoir.
«Entre le boisé et le champ, à une minute de marche, il y a la dompe, des tas d’immondices faites de conserves, de raccords de plomberie, de bouteilles brunes, de cendres, de chiens abattus, de pelures, de ciseaux cassés. Une fois par semaine, quelqu’un y met le feu pour l’hygiène» (Dée, p. 12).
«Ici, des rivières de hontes, de peines et de saletés, des rivières de rats, des dompes bourbeuses qui serpentent à travers les vies tranquilles de leurs riverains» (l’Habitude des ruines, p. 186).
Ce n’est généralement pas là qu’on laisse l’être non aimé : amoureusement, il est peu courant de domper à la dompe. De même, on ne voit pas pourquoi quiconque voudrait domper la puck à la dompe. En revanche, on peut plus facilement domper quelqu’un à la dompe.
Les Canadiens de Montréal affrontent actuellement les Panthers de la Floride — c’est du hockey. Des sources conjugales proches de l’Oreille tendue ont été fort étonnées d’entendre, au Réseau des sports, le joueurnaliste Benoît Brunet vanter le papier sablé de l’équipe de Sunrise.
Qu’est-ce que ce papier sablé ? En langue de puck, l’expression désigne des joueurs qui ne font pas dans la dentelle : ils sont là pour leur jeu rugueux.
Ken Dryden emploie l’équivalent anglais, «sandpaper», dans sa biographie de Scotty Bowman (p. 355).
Oui, le papier sablé est un des outils favoris de la petite peste.
Melançon, Benoît, Langue de puck. Abécédaire du hockey, Montréal, Del Busso éditeur, 2014, 128 p. Préface de Jean Dion. Illustrations de Julien Del Busso.
En 1972, Trevanian parlait de «beau pétard» (p. 11).
Dans les deux cas, il s’agissait de louanger la plastique de personnes du sexe.
L’expression est plus ancienne encore. On la trouve en 1953 chez Paul Verchères :
Le grand vieux se pencha vers son compagnon et lui dit assez haut, pour que les filles l’entendent :
— Deux beaux pétards, hein Aristide (p. 25).
Ce sera tout pour l’instant.
P.S.—Il a été question du contact des langues chez Trevanian ici et de la langue de puck chez Verchères là.
[Complément du 6 décembre 2021]
«Les deux pétards» de Richard Desjardins (l’Existoire, 2012) sont une «déesse» et un «loup alpha en cuir d’agneau». On les retrouvera morts dans une chambre d’hôtel :
Le coroner lit le verdict
Ça s’est passé vers les minuit
Je suis formel catégorique
Nos beaux pétards
Sont morts d’ennui