L’art des portraits contrastés

Kev Lambert, les Sentiers de neige, 2024, couverture

«Le plus vieux des Lamontagne [Gilles] est un monsieur maigre qu’on ne devinerait jamais parent de Roch; sans l’arc épais de leurs sourcils, personne ne pourrait se douter que ce sont des frères. Roch a la constitution majestueuse des Lamontagne, c’est une formidable montagne de chair, au visage plein, bourru et tendre, à la peau mate. Ses cheveux sont tellement noirs qu’ils tirent sur le bleu, ils sont aussi épais qu’un casque de bain, et ont la même forme. Son impressionnante moustache semble avoir une vie indépendante, aussi active qu’un mulot qui aurait élu domicile sous son nez. Même en sortant de la douche, Gilles sent la cigarette. Sa peau est terne, desséchée, ses cheveux gris tirant sur le jaune sont peignés vers l’arrière, dans une coupe vaguement disco qui sert à camoufler sa calvitie de fond de tête. Le corps minuscule de l’aîné est tendu, stressé, torturé par des nerfs mal accordés, noués trop serrés. Sa sueur colle, laisse sur les objets qu’il touche une trace de goudron.»

Kev Lambert, les Sentiers de neige. Conte d’hiver, Montréal, Héliotrope, 2024, 412 p., p. 77.

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