Une fidèle lectrice de l’Oreille tendue s’interroge : qu’est-ce qu’une couleur humaine ?
C’est que la mode a changé. Nous aurions vécu jusqu’à tout récemment — cela avait échappé à l’Oreille — dans un monde atone, mais ce serait fini, dixit Lise Fournier, du quotidien le Soleil : «À la suite de la dernière crise financière et de la difficile remontée de l’économie, les consommateurs, faut-il s’en étonner, ont perdu le goût du drabe.» Exeunt les «tons “tristounets”» et les «styles contemporains politiquement trop corrects». Il faut revenir vers l’émotion et pencher «en faveur de couleurs charmantes et plus humaines».
Ne nous interrogeons pas sur ce que seraient des couleurs moins humaines, voire inhumaines. Contentons-nous d’indiquer de quoi demain sera fait sur le plan chromatique : «Des noms comme galet de mer, soufflé d’avocat, beige sable, vinaigre de cidre, tarte au citron, jujube rouge, lunaison et pastis en disent long sur les petits plaisirs de la vie qu’on peut s’octroyer.»
Tout ce que l’Oreille ignorait du travail symbolique des «coloristes» !
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Vous ironisez et pourtant, « notre » 18e siècle fut féru d’expressions amphigouriques pour exprimer les couleurs. Je ne donnerai comme exemple que le si évocateur (et si rococo) « rose cuisse de nymphe émue ».
Et je vous demande, la cuisse de la nymphe a-t-elle couleur humaine?