En mars 2013, à un test intitulé «Les 8 astuces pour réussir une mauvaise photo d’écrivain», l’Oreille tendue avait eu un score parfait.
Elle a faibli depuis. Au palmarès de Paul Hiebert, «Against Promotional Author Photographs», elle n’a plus que 3,5 points sur 5.
Elle a une «photographie sophistiquée» («The Sophisticated Photograph (aka “The My-head-is-so-weighted-down-by-great-thoughts-it-requires-additional-support”)»). (Un point)
Elle a une «photographie de bureau» («The Office Photograph (aka “The Oh-I-didn’t-hear-you-enter-please-come-in-it’s-really-no-problem”)»). (Un point)
Elle a (presque) une «photo confo» («The Comfortable Photograph (aka “The Torso-twist-with-arm-resting-on-back-of-couch”)») : il y a la torsion du torse et la main qui se repose, mais pas sur un canapé. (Un demi-point)
Non fumeuse, elle ne peut avoir la «photographie du fumeur» («The Smoker Photograph (aka “The You-can’t-be-bad-ass-by-doing-what’s-good-for-you-and-your-children”)»). (Aucun point)
Elle a, variation sur la première catégorie, une «photographie main / visage» («The Hand-To-Face Photograph (aka “The Face-alone-is-boring-and-therefore-not-enough”)»). (Un point)
L’Oreille devra donc soigner ses clichés, histoire d’obtenir de meilleurs résultats. Devrait-elle se mettre à fumer ?
[Complément du 16 novembre 2017]
Autoportrait au menton, chez Jean-Philippe Toussaint, dans Made in China (2017) : «Chen Tong, qui fermait la marche dans le couloir, photographiait tout scrupuleusement sur son passage, la chambre des enfants, la bibliothèque, mon bureau, une photo de moi prise ce jour-là allait finir en pleine page d’un magazine chinois, un portrait où j’étais assis dans le salon, les jambes croisées dans mon fauteuil Marcel Breuer, le visage grave, les mains croisées sous le menton, l’air pensif, avec mon crâne lisse qui devait peut-être évoquer quelque figure de moine bouddhiste aux yeux asiatiques de Chen Tong (ou le Bouddha, lui-même, qui sait, avec sa cascade de bourrelets qui lui descend sur le ventre — quoique Chen Tong ne m’ait pas encore vu en maillot de bain à l’époque — et les lobes des oreilles disproportionnés, en signe de sagesse suprême, ou de virilité hors normes, tant l’alopécie révèle souvent l’excès de testostérone, ce qui explique la corrélation, à première vue énigmatique, entre la calvitie et l’ithyphallisme — ah, c’est donc ça ! me dit un jour Madeleine)» (p. 15-16).
Référence
Toussaint, Jean-Philippe, Made in China, Paris, Éditions de Minuit, 2017, 187 p.
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