En 1998, Larry Bongie, un vieil ami de l’Oreille tendue, publiait un ouvrage proposant une lecture neuve de l’œuvre et de la vie du marquis de Sade : Sade. A Biographical Essay. Les sadologues patentés n’ont pas tous apprécié.
Deux ans plus tard, en conférence, en Saskatchewan et en anglais, l’Oreille disait tout le bien qu’elle pensait de ce livre (on peut lire le texte de cette conférence ici).
On n’a donc eu aucun mal à la convaincre de signer la préface de la traduction française du livre.
C’était à lire en 1998; ce l’est encore aujourd’hui.
Références
Bongie, Laurence L., Sade. A Biographical Essay, Chicago et Londres, The University of Chicago Press, 1998, xii/336 p. Ill.
Bongie, Laurence L., Sade. Un essai biographique, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, coll. «Espace littéraire», 2017, 408 p. Ill. Traduction d’Alan MacDonell en collaboration avec Armelle St-Martin. Préface de Benoît Melançon.
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« Un jour, examinant l’Etna, dont le sein vomissait des flammes, je désirais être ce célèbre volcan. »
(La Nouvelle Justine tome 2)
Je n’aime pas l’homme qu’était le marquis de Sade, car c’était factuellement un criminel sexuel et un manipulateur, en revanche j’admire une partie de son oeuvre et surtout ce qu’elle symbolise. Dans un monde de plus en plus orwellien et oppressif, envahi par les intégrismes, le politiquement correct et les tabous de toutes sortes, Sade symbolise en effet l’insoumission totale, la liberté de corps et d’esprit. C’est pour cette raison que son oeuvre, écrite dans un style admirable et révolutionnaire sur le plan esthétique, n’a peut-être jamais été aussi salutaire qu’aujourd’hui, et c’est aussi pour cela qu’il y a un siècle, elle fit partie des principales sources d’inspiration des poètes et peintres surréalistes : André Breton, Benjamin Péret, Salvador Dali, Robert Desnos, Paul Eluard, Man Ray, Max Ernst…
Quelques citations lumineuses du marquis de Sade :
« L’homme est-il maître de ses goûts ? Il faut plaindre ceux qui en ont de singuliers, mais ne les insulter jamais : leur tort est celui de la nature ; ils n’étaient pas plus les maîtres d’arriver au monde avec des goûts différents que nous ne le sommes de naître ou bancal ou bien fait. »
« L’imagination ne nous sert que quand notre esprit est absolument dégagé de préjugés : un seul suffit à la refroidir. Cette capricieuse portion de notre esprit est d’un libertinage que rien ne peut contenir ; son plus grand triomphe, ses délices les plus éminents consistent à briser tous les freins qu’on lui oppose ; elle est ennemie de la règle, idolâtre du désordre et de tout ce qui porte les couleurs du crime. »
« Que nous importe l’opinion des gens froids, pourvu que nos âmes, plus ardentes et plus élevées que la leur, sachent jouir de ce qu’ils n’entendent pas. »
« On déclame contre les passions, sans songer que c’est à leur flambeau que la philosophie allume le sien. »
« Une vertu qui contrarie ou qui combat les passions ne peut être que très dangereuse. »
« Je suis l’homme de la nature, avant que d’être celui de la société. »
NB : l’œuvre et la philosophie de Sade étant l’objet de nombreux malentendus et contre-sens, je conseille vivement la lecture des textes de Béatrice Didier écrits à leur sujet afin d’être en mesure de bien en saisir la valeur et la signification.
Sylvain Foulquier