Ne vous compliquez pas la vie

Jonathan Livernois, la Route du Pays-Brûlé, 2016, couverture

Autrement dit : ne vous bâdrez pas de ceci ou de cela, ne vous laissez pas encombrer, importuner, embêter, déranger, embarrasser, fatiguer, ennuyer, gêner.

Exemples :

«Certes, ces mêmes étudiants sont fiers d’être ce qu’ils sont, fiers de leur culture québécoise, aussi, mais ça s’arrête là. Leurs communautés sont éparses et riches. Pourquoi se bâdrer d’un pays infirme ?» (la Route du Pays-Brûlé, p. 65)

«Je pense que c’est à notre tour maintenant de trouver une façon d’aller chercher de l’inspiration pour se renouveler hors des sentiers battus — en évitant de se badrer de considérations partisanes» (blogue).

Ephrem Desjardins propose une définition du verbe et une origine : «Bâdrer : déranger, embêter. “As-tu fini de m’bâdrer avec tes histoires ?”. Or. : de l’anglais to bother, déranger» (Petit lexique […], p. 32-33).

La Base de données lexicographiques panfrancophone, qui les trouve «familiers» ou «vieillis», et Léandre Bergeron connaissent une série de mots associés :

bâdrage («Action de bâdrer; ce qui en résulte»),

bâdrant, ante («(En parlant d’un être animé). Qui dérange, importune par sa présence, son comportement, ses propos»; «(En parlant de qqch.). Qui cause du désagrément, de la contrariété, du souci, de la gêne»; «Ennuyeux, importun»),

bâdré, ée («Ennuyé, gêné, contrarié»),

bâdrement («Chose qui dérange, ennuie, tracasse»),

bâdrerie («Chose qui dérange, ennuie, tracasse»; «Ennui, tracas, souci, contrariété, embarras, dérangement»),

bâdreux, euse («(Personne) qui dérange, importune par sa présence, son comportement, ses propos»; «Ennuyeux, importun, fatigant, bâdrant (en parlant d’une personne)» — mais aussi «Homme habile, capable, extraordinaire»; «Capable de choses peu ordinaires»).

 

Références

Bergeron, Léandre, Dictionnaire de la langue québécoise, Montréal, VLB éditeur, 1980, 574 p.

Desjardins, Ephrem, Petit lexique de mots québécois à l’usage des Français (et autres francophones d’Europe) en vacances au Québec, Montréal, Éditions Vox Populi internationales, 2002, 155 p.

Livernois, Jonathan, la Route du Pays-Brûlé. Archéologie et reconstruction du patriotisme québécois, Montréal, Atelier 10, coll. «Documents», 09, 2016, 76 p. Photographies de Justine Latour.

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2 réponses sur “Ne vous compliquez pas la vie”

  1. J’avais toujours plutôt pensé que bâdré était formé à partir de bât comme dans ‘cheval de bât’ – se bâdrer signifierait donc accepter de porter un fardeau.

  2. J’aime cette étymologie, plus vieille de loin que « bother » anglais. Ma grand-mère Acadienne l’utilisait potentiellement d’une source anglophone, mais si l’expression existe en Louisiane, elle est plus vieille que le « bother » anglais ou le « pother’ écossais puisque les Cajuns sont arrivés vers 1760.

    Étymologie de « bât » Dispositif de portage adapté aux animaux de somme, servant à répartir et fixer la charge. (harness type straps to carry a burden)
    Du provençal bast, de l’espagnol et de l’italien basto, et du bas-latin bastum. Ces termes proviennent du radical grec ancien ßast??e??, bastázein (porter), et ß?sta?, bástax (bête de somme (beast of burden!)) Ce radical est également présent dans les mots français bâtir et bâton, et a le sens de soutenir, porter, affermir. Le mot « bât » apparaît au XIIIe siècle et supplante l’ancien français somme.

    Le bâdrer/bâdré des Acadiens (et probablement leurs ancêtres français) devrait donc être « bâtrér/bâtré » et c’est la prononciation qui aurait un peu changé.

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