Il est de ces mots dont le sens varie fort — c’est le moins qu’on puisse dire — d’une situation à l’autre. Prenons moyen.
Dans certains cas, il marque le trop, le beaucoup.
«Deux moyens malades, elle a dit…» (Gros mots, p. 89).
«Une conversation butinante, sans but précis : il y a longtemps qu’on t’avait vu, le bar est tranquille, moyenne chaleur, non ?, paraît que les agriculteurs en arrachent» (Tarmac, p. 237).
Dans d’autres, c’est le pas assez. Le fils cadet de l’Oreille tendue raffole de cette réponse, que l’on trouve aussi dans la bouche d’un personnage de Hongrie-Hollywood Express d’Éric Plamondon :
«c’est moyen» (p. 153).
Allez y comprendre quelque chose.
[Complément du 28 décembre 2012]
Des sources conjugales proches de l’Oreille insistent pour préciser que ledit fils cadet, à «C’est moyen», préfère, tout simplement, «Moyen». Ces sources sont incontestables.
Références
Dickner, Nicolas, Tarmac, Québec, Alto, 2009, 271 p. Ill.
Ducharme, Réjean, Gros mots. Roman, Paris, Gallimard, 1999, 310 p.
Plamondon, Éric, Hongrie-Hollywood Express. Roman. 1984 — Volume I, Montréal, Le Quartanier, «série QR», 44, 2011, 164 p.
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Il me semble que le premier sens est plus ancien, voire vieilli (et remplacé par « méchant »). Je croirais le second emprunté à l’Outre-Atlantique, ne croyez-vous point?
Il est vrai que méchant est devenu commun, mais l’Oreille tendue ne croit pas moyen en danger pour autant. Quant au second sens, son étymologie hexagonale entraînerait une autre question : comment s’est-il rendu dans la bouche du cadet de l’Oreille ?
Ce qui semble sûr, c’est qu’il y a toujours « moyen de moyenner ».